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Histoires Des Invités

La Posture De L'Araignée.

Par Esther Langlewich

 

Je m’appelle Agathe Boulanger, j’ai actuellement trente et un ans ; mais l’histoire que je raconte ici, mes relations avec ma copine d’enfance Claudine Chevrier, s’est arrêtée voici quatre ans déjà. Nous nous connaissions depuis l’âge de 14 ans, lorsque nous usions nos d’jeans, artificiellement délavés et troués, sur les bancs de l’école dans la même classe de quatrième. C’était à l’âge où nos poils pubiens et nos menstrues ne nous étonnaient plus. La curiosité envers les choses du sexe nous avait conduites à une exploration mutuelle de nos corps de vierges effarouchées. D’abord timidement, dans les cabines de douche, nous avions baissé d’jeans et culottes l’une devant l’autre, pour constater que, finalement, il n’y avait pas grande différence entre nous deux, sinon que la touffe de Claudine tendait sur le roux, et la mienne vers le châtain foncé.

Après le regard, ce fut le toucher. Je me souviens que la première fois où Claudine, d’un doigt hésitant, effleura la peau de mon ventre, nous avons considéré cet exploit comme le summum de la transgression. Les garçons de notre âge nous semblaient plutôt bébêtes avec leurs rires niais et leurs visages boutonneux ; il ne nous venait donc pas à l’idée de les associer à nos jeux puérils. C’est pourquoi les premières sensations érotiques commencèrent vraiment lorsque nous sommes allées chercher, d’abord dans le dictionnaire, puis entre nos cuisses, cet objet mystérieux dont le nom avait frappé nos oreilles, mot sorti comme par mégarde de la bouche de notre professeure de SVT (sciences de la vie et de la terre) : le clitoris. Ce fut une révélation, pour Claudine comme pour moi.

 

Chapitre 1. Brutalement déflorée

Depuis lors, il ne se passa guère de semaine sans que, dans un endroit discret, -le plus souvent dans sa chambre de fillette, - nous ne poursuivions nos recherches par des travaux pratiques. Cependant il fallut presqu’un an avant que je connusse un petit orgasme provoqué par le frottement obstiné et maladroit du doigt de Claudine sur mon clito. Douze mois plus tard, l’expérience des intromissions commença. Oh, à toutes petites doses et sans grande originalité. La première étape fut franchie lorsque Claudine, m’ayant fait jouir par la voie clitoridienne, me tendit son doigt humecté de ma mouille et me dit : « Agathe, lèches ». Me voyant hésiter, elle approcha son doigt de mes lèvres et attendit. Finalement j’ouvris la bouche et suça ce bonbon allongé. Le goût de ma cyprine ne me déplut pas. Du coup, en chaque circonstance semblable, sans compter toutes les fois où je me masturbais seule dans ma chambre ou dans les toilettes, je réactualisais ce rite de propreté en léchant consciencieusement le doigt qui m’avait provoqué tant de plaisir. Mais Claudine n’acceptait pas encore la réciproque.

Satisfaites l’une de l’autre dans nos découvertes érotiques, nous ne regardions pas plus loin que le cagibi de nos ébats d’adolescentes. Autour de nous, les garçons passaient comme des ombres. Nous ne nous doutions pas qu’ils auraient pu nous entraîner dans des plaisirs plus excitants. Cette benoîte satisfaction mutuelle est la raison par laquelle, nous retrouvant, deux ans plus tard, étudiantes dans la même ville, s’imposa comme une évidence l’idée de vivre ensemble. -Pour nos parents il s’agissait officiellement de « coloc » pour économiser sur le prix de la chambre.- Mais nos lits jumeaux étaient collés l’un à l’autre, comme nos corps lors de certaines nuits torrides.

C’est au cours de cette période lesbienne que je posai un soir, sur l’oreiller, la question qui me taraudait l’esprit depuis longtemps : « Claudine, as-tu déjà pensé au plaisir vaginal ? ». – « Souvent, me répondit-elle ; mais aucun garçon ne m’attire suffisamment pour lui offrir mon puits d’amour. » Je ne dis plus rien cette nuit-là ; mais je restais songeuse : pourquoi faut-il un garçon alors que toutes les boutiques ad hoc vendent des phallus artificiels ?!

Quelques semaines plus tard, à l’occasion de l’anniversaire de Claudine qui fêtait avec moi ses dix-neuf ans, je lui offris, enveloppé dans un beau papier-cadeau, une verge en érection, que le vendeur goguenard m’avait assurée être une réplique exacte, en taille et en couleur, de son propre sexe dressé. Claudine rougit, fit semblant d’être contente de ce cadeau original, mais ne songea pas à l’utiliser, ni sur elle, ni sur moi. La nuit se passa en caresses mutuelles. Cependant, pour marquer cet anniversaire, Claudine accepta quand-même de sucer mon doigt humecté de son jus vaginal, mais ne sembla pas y trouver autant de goût que moi. Le lendemain matin, après un petit déjeuner très sage (thé, pomme et tartine grillée recouverte d’une mince pellicule de beurre demi-sel), elle rangea soigneusement l’objet dans ses affaires et ne m’en reparla plus.

Cette disparition de l’objet de mon phantasme excita mon imagination ; mais, à la différence de Claudine, je ne voulais pas attendre de tomber amoureuse d’un garçon pour me débarrasser de ma virginité. À la réflexion, je crois que j’étais amoureuse… de Claudine. C’est sans doute pourquoi, deux mois plus tard, n’y tenant plus, alors que nous nous caressions tendrement sous la couette, je lui demande comme si de rien était : « Claudine, as-tu conservé le plug que je t’avais offert pour tes dix-neuf ans ? » - « Je pense que oui, me répond-elle d’une voix traînante sur un ton indifférent, pourquoi ? » - « Je désire que tu l’utilises sur moi. » - « Mais, Agathe, tu es folle ! » - « Non, Claudine, j’ai bien réfléchi. Je ne connais aucun garçon à qui j’aurais envie d’offrir ma virginité. Mais avec toi, ce n’est pas pareil ; je crois que je t’aime, et ce serait pour moi une bonne façon de te le dire, et d’en témoigner pour toujours en le gravant dans mon corps … car il n’existe qu’une première fois pour déchirer l’aiguillette ! » Elle me coupe la parole : « Ne compte pas sur moi pour cet acte de boucher. » J’insiste ; elle refuse. J’insiste encore. Finalement elle me dit : « Si tu veux vraiment perdre ton pucelage, je vais te chercher l’engin, et tu l’utiliseras toi-même, sur toi-même, comme tu veux. »

Sur ces paroles, elle se lève, et va fouiller dans ses affaires. Je l’entends remuer des tas de trucs, pendant de longues minutes. Finalement, elle revient avec le phallus dans la main. Elle me le tend. J’hésite à le saisir, car je sens que quelque chose ne va plus entre nous deux. Finalement, je me surprends à dire : « Écoute, Claudine, pas comme ça. Je ne me vois pas introduire cet objet dans mon bas-ventre avec toi qui es là, qui me regardes, à côté, sans rien faire ; ça n’a pas de sens. » Je sens qu’elle lutte intérieurement pour se convaincre de la bonne chose à dire ou à faire. Finalement, elle avoue, comme à regret. « Eh bien Agathe, … d’accord ! » Après quelques instants de silence, elle ajoute, à la manière d’une institutrice d’école maternelle : « Mais je ne veux pas salir les draps. Je vais chercher une serviette que je jetterai immédiatement après. » Pendant qu’elle retournait à la salle de bain, je réfléchis. Finalement, je suis là, toute bête, stupide. Elle va faire, contrainte et forcée, avec un air dégoûté, ce que j’imaginais être un geste de bonheur. Claudine revient vers moi. Au moment où je m’apprêtais à lui signifier que mon désir a disparu, je m’aperçois que son visage est tout autre, reflétant une gaité nouvelle, comme si elle avait bu un verre de vin. Je ne sais trop quoi penser. Je ne connaissais pas encore le visage d’une passion sadique…

Avant même que j’ai eu le temps d’ouvrir la bouche, d’un geste Claudine me fait signe de bouger mes fesses ; elle écarte la couette, qui tombe par terre, et pose une serviette blanche sur le lit : « Agathe, allonge-toi sur le lit de manière que tes fesses reposent sur la serviette. Replis les genoux et écarte bien les cuisses. » Oubliant ma résolution, j’obéis, mais sans enthousiasme ; ça ne se passe pas du tout comme je l’avais rêvé. Dans une conscience brumeuse, comme venu d’une voix lointaine, j’entends le commentaire de Claudine : « Tu veux vraiment devenir femme ? Eh bien, tiens, prends ça ! » Je hurle. Mon bas-ventre me brule atrocement. Oh, la salope ! D’un geste brutal et sans aucune préparation, Claudine m’a enfourné le plug dans le vagin. De la main gauche, elle appuie sur ma poitrine pour maintenir mon dos collé sur le lit. De sa main droite, elle fait glisser l’engin fébrilement dans mon puits d’amour, ce qui prolonge ma douleur. Le manège dure quelques secondes. Finalement la douleur s’atténue, elle retire de mon vagin le phallus ensanglanté, avec la serviette rougie m’essuie vaguement la chatte, tire la serviette de dessous mes fesses et va vers la cuisine pour la jeter à la poubelle. Je suis furieuse.

Lorsqu’elle revient, d’une voix courroucée, je lui dis : « Claudine, tu m’as fait horriblement mal. Crois-tu vraiment que le garçon auquel tu livreras ta virginité sera aussi brutal ?! » - « Agathe, répond-elle d’une voix butée qui trahit l’agacement, je n’en sais rien ; mais ce que je sais, c’est que, si je l’aime, je serai entièrement à lui, corps et âme ; j’accepterai qu’il traite mon corps d’une façon bien pire, si tel est son désir ou simplement son plaisir. »

 

Chapitre 2 Un goujat de rencontre

Je restai songeuse. Mais, depuis cette nuit-là, nos rapports furent moins confiants, tout en restant amicaux. Nous avons vécu ensemble encore un an. Claudine rencontra un garçon et finalement, après m’avoir juré que c’était l’amour de sa vie, me quitta pour aller habiter chez lui. Plus tard, je me suis aperçu qu’elle avait oublié -volontairement peut-être ?- le plug que je lui avais offert le jour de ses dix-neuf ans et qui n’avait servi qu’à mon dépucelage brutal. Près d’un an se passa sans nouvelle de Claudine. Au moment où j’allais définitivement l’oublier, je la rencontrai par hasard au sortir d’une salle de cinéma, près de la place Clichy. « Agathe, comment vas-tu ? » Elle semblait heureuse de me revoir, mais n’était manifestement pas épanouie ; elle avait les traits légèrement tirés. Je l’invite à boire un verre au café du coin, curieusement nommé Le renversé. (J’ai appris plus tard qu’un café renversé n’était tout simplement qu’un café avec un peu de crème dedans, à ceci près qu’on met la crème au fond de la tasse avant de verser dessus un café allongé.) Elle accepte avec empressement. Tout en sirotant un breuvage qui n’avait de café que le nom, je l’interroge : « Alors, Claudine, comme va ton amoureux ? » - Claudine éclate en sanglots : « Nous avons rompu après trois jours de cohabitation, infernale… » J’attends.

Elle continue, tristement, les larmes dans les yeux : « Je ne sais pas si tu te souviens, je t’avais dit que j’étais prête à accepter tout de mon amant ? Eh bien, j’étais follement amoureuse, mais, sous le coup de sa brutalité, je n’ai pas résisté longtemps. Mon dépucelage ne fut peut-être pas aussi brutal que celui que je t’ai fait subir, mais pas loin. Dès le premier soir il m’a obligée à lui faire une fellation. Je m’y pris très mal ; il m’a giflée. La seconde nuit ensemble fut atroce, j’ai subi une sodomisation forcée ; il m’avait tordu le bras derrière le dos, m’obligeant à me mettre à genoux, le front collé au matelas, les fesses relevées. Il ne s’embarrassait pas des préparatifs ; la tendresse en était absente ; « il prenait son plaisir, me disait-il, comme il l’entend ». Le troisième jour, ce fut le comble : il a ramené à la maison deux copains. La soirée fut arrosée, ils ont joué au poker ; comme mon amant perdait, il mit en jeu … « une demi-heure de plaisir avec moi » ! Évidemment, il ne m’avait pas demandé mon avis. J’étais angoissée. Il perdit encore. Le gagnant fut un homme de dix ans plus âgé que moi, à la trogne d’ivrogne. Comme je ne voulais pas qu’il me touche, j’ai crié, je me suis débattue. Alors mon amant et l’autre copain me saisirent par les pieds, les entravèrent sommairement avec une serviette, puis ils me jetèrent sur le lit, m’attachèrent par les poignets aux montants du lit. Les bras écartés, je me débattais encore, donnant de violents coups de talons. Ils attachèrent alors mes chevilles aux pieds du lit, les cuisses très écartées. Comme je portais encore mes vêtements, ils ont saisi un couteau de cuisine et coupèrent robe, slip et soutien-gorge comme on ouvre un poulet. J’avais peur qu’ils me torturent, ou même simplement que le couteau ne m’écharpe. Il n’en fut rien, heureusement. Offerte sans pouvoir défendre mon intimité, le gagnant du poker se jeta sur moi, tortura mes seins, me souffla dans le nez son haleine putride, vomit sur ma poitrine et, sans plus de précaution, enfonça son dard dans mon puits d’amour. Je restais toute une partie de la nuit attachée et couverte de sperme et de vomissures, jusque vers trois heures du matin, quand ils partirent. Sitôt libérée, j’enfilai ce qui me restait de ma garde-robe et m’enfuis chez mes parents. Pendant plusieurs semaines, je me sentais coupable. J’avais honte, comme si c’était moi qui avais fait des choses horribles, me demandant s’il n’eut pas mieux valu qu’un accident mortel interrompe cette sinistre nuit... » Ici, Claudine s’interrompt, prise d’un spasme et se remettant à pleurer, comme frappée de stupeur au souvenir de cette nuit atroce. Trente seconde plus tard, elle remarque : « Je lui offrais mon puits d’amour ! Non. C’était pour lui simplement un trou à boucher. »

Nous restâmes longtemps dans le cabaret, buvant plusieurs tasses de café. Claudine me raconta ses semaines d’errance, puis sa vie morose chez ses parents. Aujourd’hui, elle avait repris ses études, en tentant d’oublier ces événements tragiques. Elle conclue : « Ah, combien de fois j’ai regretté ce que je t’avais fait subir… Agathe, est-ce que tu me pardonnes ? » Je lui assurai que oui, que tout était oublié, qu’il fallait regarder désormais vers l’avenir. Finalement, nous nous quittâmes ce soir-là après avoir échangé nos numéros de téléphones et en nous promettant de nous revoir.

 

Chapitre 3. Dérives maritales

En fait, ce n’est que quinze mois plus tard qu’elle me fit signe : elle m’invitait à ses fiançailles ! Elle avait retrouvé l’amour. Le garçon, prénommé Roger, était le meilleur qui puisse être, jeune ingénieur chez Citroën. Elle avait été présentée à sa future belle-famille qui semblait accepter sans réticence cette « pièce rapportée » (son futur beau-père disait « morceau choisi » et son fiancé « valeur ajoutée »).

À partir de ce moment-là, ma relation avec Claudine renoua avec les thèmes et les sentiments réciproques de notre adolescence. Je fus témoin à son mariage. À périodes régulières, -une fois tous les deux ou trois mois environ,- nous nous retrouvions pour un thé ou pour un repas avec son mari, un gentil garçon, assurément. Un jour que nous étions seules, Claudine et moi, la conversation s’égara sur les fantasmes masculins. Avec la même spontanéité que celle que nous avions partagée dans notre jeunesse, elle me parla des pratiques sexuelles de son mari. « Roger préfère, comme moi, la position du missionnaire ; c’est confortable pour les deux partenaires, et la copulation peut s’agrémenter, tout au long du coït, de caresses et de mots doux. On se voit face à face, et c’est très agréable. » Je n’osais évoquer d’autres pratiques que les hommes, qui ont tous un petit côté sadique, aiment imposer à leur partenaire. Dans une allusion très légère, je dis simplement : « Ton mari n’a-t-il pas d’autres exigences ? » - « Tu veux parler de fellation ou de sodomie ? Je ne suis pas naïve au point de m’imaginer que ces phantasmes lui sont étrangers ; mais, en ce qui me concerne, je crois que je l’aime assez pour lui administrer, s’il le veut, une fellation -bien que je ne sois pas experte en la matière- mais Roger ne me l’a jamais demandée. » (Je pensais à ce qu’elle m’avait dit de la gifle reçue de son premier amant pour une fellation ratée.) J’ajoutais comme un corollaire de son aveu : « Mais tu ne l’aime pas assez pour accepter qu’il te sodomise… » Elle acquiesça. Avant de nous séparer ce jour-là, j’esquissais une remarque que je regrettais aussitôt : « Si tu penses que Roger aurait plaisir à recevoir de toi une fellation ; pourquoi ne lui offres-tu pas cette surprise, à l’occasion de votre anniversaire de mariage, par exemple… » Je ne croyais pas si bien dire.

Deux mois plus tard, nouvelle rencontre avec Claudine. Elle vint à moi rayonnante et excitée. Sitôt assises dans le bar « aux trois gigots » rue Falguière, une de ces brasseries parisiennes sans grande originalité, elle me dit avec volubilité, et sans prendre garde aux voisins de la table d’à côté qui pouvait l’entendre : « Tu te souviens, Agathe, de ce que tu m’as dit l’autre fois en me quittant ? » - Je mentis effrontément : « Non Claudine, vraiment, je ne m’en souviens plus. » - « Mais si ! Tu m’incitais à offrir une petite surprise à Roger, sous la forme d’une fellation. Eh bien, je l’ai fait, pas plus tard qu’avant-hier. Non pas à l’occasion de notre anniversaire de mariage, comme tu l’évoquais, mais au cours d’un week-end en amoureux dans une ferme-auberge près de Nevers. » Je ne pus m’empêcher de demander : « Et alors, comment a-t-il réagi ? » - « Merveilleusement ! Je ne lui ai pas demandé s’il voulait une fellation, je ne l’ai pas averti par avance. Nous nous caressions tendrement lorsque, écartant la couette, je lui souffle dans le creux de l’oreille : attends, laisse-toi faire… Je m’installe entre ses jambes, prends son bâton viril entre mes mains, le malaxe pour lui donner une rigidité suffisante, puis je courbe le dos et la tête, et lèche son gland avec ma langue. Au bout d’une minute, bouche ouverte je penche davantage ma tête et enveloppe de mes lèvres sa verge. J’essaie de garder mes dents en retrait. (J’ai conservé en mémoire la leçon de mon premier amant.) Son dard durcit encore. À ce moment-là, Roger m’agrippe par les cheveux, non pas pour maintenir ma tête enfoncée sur son tuyau, mais au contraire pour retirer ma tête de son bas-ventre ; il m’enlace et me couvre de fougueux baisers ; il introduit sa langue dans ma bouche, comme pour la nettoyer des miasmes de sa bite. Reprenant sa respiration il me chuchote : « Ce que tu fais me fait extrêmement plaisir ; mais je suis certain que ça a pour toi quelque chose de répugnant. Certes, tu le fais par amour pour moi ; mais quand-même… » Je lui réponds : « En effet, tu as raison,, ça me coûte, mais je suis prête à aller beaucoup plus loin, si tel est ton bon plaisir. » Roger ne répond rien. Me dégageant de ses bras, je lui ordonne : « Laisse-moi faire et laisse-toi faire !», et je me replace dans la position pour le second acte de la fellation. Il ne proteste pas. Je sens venir chez lui d’abord la tension du bas-ventre, ce léger frémissement qui devient assez vite tremblement, puis l’excitation qui prélude à l’éjaculation. Par réflexe incontrôlé, je dégage ma bouche lors de la première giclée, mais pas suffisamment vite pour échapper au premier jet de sperme sur mon visage. Le reste du liquide blanchâtre et visqueux aboutit sur son ventre et sur les draps. Alors, de nouveau, Roger m’attire sur lui et me lave le visage avec sa langue. « Hum, dit-il avec une pointe d’humour, mon sperme n’a pas mauvais goût. » J’interprète ces paroles comme un gentil reproche, et je me promets d’avaler le sperme lors de ma prochaine fellation. »

J’interromps Claudine, n’arrivant pas à maîtriser ma curiosité. « Et que s’est-il passé la fois suivante ? » - « Chère Agathe, ce que je viens de te raconter s’est passé voici juste deux jours ; pour l’instant il n’y a pas eu de fois suivante. J’attends le bon moment. Mais tu me sembles bien curieuse. Est-ce le signe d’une frustration ? » -« Ne crois pas ça, Claudine. Ma vie sexuelle n’a pas été aussi tourmentée que la tienne ; j’ai eu quelques passades avec des hommes, je me suis fait aussi un « plan cul » avec une lesbienne deux ou trois fois, mais rien de très convaincant. Plus habituellement, je me satisfais de l’outil que je t’avais offert pour tes dix-neuf ans et que tu m’as gentiment laissé en héritage. Bref, je n’ai jamais été amoureuse au point de me laisser entraîner dans une chaude aventure de longue haleine. Je ne suis même pas certaine que, au fond de moi, j’y aspire vraiment. » - « Si je t’ai bien comprise, tu es une sorte de pan-sexuelle, au-delà des transgenres, du bi sexuelles et des lesbiennes. » - « Peut-être, à vrai dire, je n’y ai jamais pensé ; et me classer dans une catégorie de sexologue ne me semble pas très important. »

 

Chapitre 4 Le piège du plaisir

Notre rencontre suivante, trois mois plus tard, se passa chez moi. J’avais invité Claudine et son mari je ne sais plus à quelle occasion ; mais son mari fut retenu au dernier moment par une mission de trois jours en Autriche. Nous nous retrouvions donc seules, Claudine et moi, dans un cadre familier propice aux confidences. Nous avons parlé de son avenir, du métier d’orthophoniste qu’elle visait ; elle envisageait de s’installer à la fin de l’année. Bref, l’horizon s’ouvrait devant elle. L’ambiance était à la confiance ; aussi, je n’ai pas réfléchi longtemps avant d’orienter la conversation vers les sujets qui excitaient ma curiosité. « Et alors, as-tu trouvé la bonne occasion de lui prouver ton amour par une fellation totale en avalant le sperme ? La seconde fois fut-elle la bonne ? » - Claudine semble revivre durant quelques instants la scène que j’évoque. Sa réponse me surprend : « Ma chère Agathe, puisque tu veux tout savoir, saches que nous avons dépassé ce stade. » - « Comment cela, dépassé ? » - « Avaler le sperme de Roger est devenu, comment dirai-je…? une sorte de rite hebdomadaire. C’est lui maintenant qui est demandeur. Une fois ou deux, il m’a dit de garder son sperme dans ma bouche pour qu’il puisse le partager avec moi : repas de communion, prétend-il. »

Je voulais en savoir davantage. «Et tu ne l’aime toujours pas assez pour accepter une sodomie… ? » Claudine réfléchit un instant, comme si elle hésitait à me dire toute la vérité. Finalement, après avoir ingurgité une gorgée de Beaujolais, elle me dit. « Sur ce plan-là, les choses n’ont guère changé : je refuse toujours. Ce qui a changé, c’est que Roger a pris l’initiative. Un jour, après de long et savoureux préalables durant lesquels nous nous sommes caressés avec tendresse, au moment où passer à l’acte nous semblait à tous les deux nécessaires, il me dit brutalement ‘j’aimerais te prendre par derrière et enfiler ta rosette…acceptes-tu mon dard dans ton petit trou ?’ La demande était si explicite, si brutale, et sur un ton si péremptoire, qu’elle me surprit. Je ne me contentais pas de faire un signe négatif de la tête, je répondis clairement ‘non, pas tout de suite, je ne suis pas prête, j’ai encore de mauvaises images dans ma tête’. Je le sentais frustré. Pour le consoler, je lui proposai de me prendre en levrette. Roger accepta. »

J’interromps son monologue : « Claudine, la posture de la levrette n’est pas très différente que celle de la sodomie ; n’as-tu pas eu peur qu’il en profite pour t’empaler dans le cul plutôt que dans le vagin ? » -« Non, pas du tout, Agathe. J’ai grande confiance dans la parole de mon mari. Et Roger a tenu parole. Je me plaçai spontanément à genoux sur les bords du lit, le front posé sur l’oreiller ; lui était debout derrière moi, il a tenu mes hanches avec ses deux mains et m’a honorée. » Je pensais par devers moi : Roger a pris son épouse comme un chien honore une chienne et un taureau sa vache. Mais je me contentais de demander : « Et quelles sensations as-tu senties ? » - « Rien de très particulier : L’homme a sans doute l’impression de dominer davantage, car il est debout, et moi dans une position de soumission, pour ne pas dire d’adoration du croyant qui n’ose regarder son dieu face à face ; et cela contribue certainement à son plaisir. Mais pour moi, le point de contact est si localisé que d’emblée, ma préférence va vers la traditionnelle position du missionnaire où toute la peau est sollicitée, où je vois le visage de Roger, et où l’on peut s’embrasser sur la bouche pendant qu’il me pénètre. »

 

Chapitre 5. Initiation

De cette conversation, je tirai la conclusion que Claudine se coulait dans une vie sexuelle genre petit-bourgeois, sans risque, en un mot banale. Aussi ma surprise fut immense, deux mois plus tard, lorsque, reprenant le fil de notre conversation antérieure, elle m’expliqua l’évolution récente de ses relations sexuelles avec son mari : « Roger a reformulé plusieurs fois sa demande de sodomie, et d’une manière de plus en plus insistante ; mais sans jamais me violenter. J’ai toujours répondu par la négative. Finalement, après mon Nième refus, il me dit sans agressivité aucune : ‘Tu me refuses ce plaisir, tu ne veux pas m’offrir ta rosette, tu mériterais une fessée’. Prise par une sorte de scrupule, et comme pour me punir moi-même de ne jamais céder à son caprice, je m’entends répondre. ‘Si ça peut te consoler, ne te gènes pas’. – ‘Et si je te prenais au mot ?’ a-t-il demandé. Je réponds d’un geste en faisant tomber du lit la couette, en remontant ma nuisette pour laisser bien exposés mes fesses et mes cuisses et en m’allongeant sur le ventre. Comme par défi, je lui dis : ‘vas-y’. Roger hésita plusieurs secondes puis me donna trois ou quatre petites tapes sur mon joli derrière, me fit retourner sur le dos, me sourit en me disant : ‘Satisfaite ?’ – Il faut te retourner la question, lui répondis-je. – ‘Sans mentir J’aurais volontiers continué l’exercice’, me répondit-il. – Alors continue ! – ‘Ce sera pour la prochaine fois’ conclut-il. »

Je coupe le récit de Claudine par un brutal « Et y a-t-il eu une prochaine fois ? » - « Tu voudrais bien le savoir, chère Agathe. Eh bien oui, le scénario s’est répété souvent, presque une fois chaque semaine, selon le même rituel : il me demande si j’accepte une sodomie, je fais signe que non, il fait un geste m’ordonnant de me placer cul nu sur le ventre. La seule différence, et elle est grande, c’est que les trois petites claques sur les fesses sont devenues de plus en plus sérieuses, rudes, nombreuses -jusqu’à une dizaine. La dernière fois, il a remplacé la main par une raquette de ping-pong ; ça fait beaucoup plus mal. » - « Et tu acceptes ça ? » - « Oui Agathe, parce que je sens que cette part de sadisme qui remonte en lui le conforte dans sa position de dominant, et ça lui fait plaisir. » - « Claudine, tu as dit ‘dominant’ ; tu t’es trahie. Car si tu acceptes que ton mari soit dominant, cela veut dire que tu acceptes, toi, d’être soumise. » - « Tu as sans doute raison ; il y a vraisemblablement un peu de masochisme en moi… Mais je me sens bien dans cette position de soumise. Du moins quand ça ne va pas trop loin. » - « Mais le jour où tu constateras que c’est allé trop loin, ce sera trop tard… » - « Pour le moment, c’est encore supportable. » - « Claudine, fait attention au syndrome de la grenouille ! Plongée dans un bain d’eau tiède, la grenouille n’avait pas compris que la bassine était installée sur un feu et que la température montait. Elle croyait pouvoir s’habituer indéfiniment, jusqu’au moment où elle s’aperçu qu’elle était cuite. »

Claudine, désirant sans doute changer de sujet, rebondit sur l’idée de grenouille. Elle me détailla la posture sexuelle de la grenouille. Son mari, un jour, était revenu à la maison avec un exemplaire en français du Kâma-Sûtra, illustré par des photos sans équivoque. La position de la grenouille est simple, m’expliqua Claudine : le mâle est allongé sur le dos, la femelle empalée sur la tige, les mollets sous la cuisse de son partenaire, le dos courbé en avant pour permettre la traction des bras, les mains appuyées sur le lit de part et d’autre du buste, les jambes sont donc coincées. « Et le mouvement ? » demandai-je. « Quel mouvement ? » - « Celui qui permet à l’excitation d’atteindre son paroxysme et la jouissance complète » - « Par la flexion des bras, comme, dans les exercices de sport, on faisait des pompes.

J’en reviens à ce qui m’excite davantage. « Tu vas un jour ne plus supporter les fessés, surtout si elles prennent un tour de plus en plus douloureux… » - « Certes, elles sont douloureuses ; mais le plaisir qu’elles apportent manifestement à Roger me les rend supportables. » - « Mais ça te conduira fatalement à céder au désir de ton mari : soit la sodomie qui te fait revivre ton abominable expérience avec ton premier amant, soit la douleur, qui va devenir de plus en plus insupportable. » - « Agathe, pour te dire la vérité, je crois qu’il y a longtemps que je lui aurais accordé ce qu’il demande ; mais, même si inconsciemment je me souviens de l’atroce première fois avec mon amant de trois jours, je trouve en moi une sorte de jouissance à le lui refuser, pour recevoir la correction méritée. » - « Tu es vraiment masochiste ! Sous couvert du plaisir que ton mari semble prendre à te donner une fessée en triturant de plus en plus violemment ton arrière-train, tu recherches et tu trouves en fait ton propre plaisir dans la douleur. C’est la définition même du masochisme. »

 

Chapitre 6. Trahison

Quelques semaines plus tard, lors d’une rencontre au café Le coq hardi, je constatai que Claudine avec fait une grimace imperceptible au moment de s’asseoir sur la banquette couverte de molesquine. « Tu es souffrante ? » lui demandai-je. – « Non, pas souffrante, mais m’asseoir est douloureux » - « ? » - « Hier soir, avec Roger, nous avons rejoué le scénario dont je t’avais parlé : il m’a demandé si j’acceptais une sodomie, comme d’habitude j’ai refusé, et, selon les rites désormais bien établi, je me suis allongée sur le ventre, il a relevé ma nuisette pour bien dégager mes fesses, il a saisi cette fois non plus la raquette de ping-pong, mais une fine baguette de bambou, de celle qui servent de tuteur pour les plantes grimpantes dans les jardins. Il me l’a montrée en me disant, sans élever la voix, mais avec un sourire équivoque : je vais te faire regretter ton refus. De toutes ses forces, il me darda les fesses de dix coups violemment appuyés. Au troisième coup, instinctivement je voulus protéger mes fesses avec les mains. Mon mari me pris alors par les poignets qu’il fixa ensemble. J’avais les bras allongés de part et d’autre de ma tête, incapable de protéger mon postérieur. De son bras gauche, il appuyait sur mon dos pour m’empêcher de gigoter. La douleur me fit atrocement mal. Lorsque les dix coups furent reçus, il me libéra. Instinctivement, je portai ma main droite sur mes fesses, et je sentis quelque chose de gluant. Je saignais. »

- « Il faut rompre ! » dis-je sans réfléchir. J’expliquais à Claudine qu’elle était allé trop loin ; qu’elle avait laissé son mari dépasser les bornes ; qu’il ne s’agissait plus ni d’amour, ni de plaisir, mais de sadisme. Si elle le voulait, je pouvais l’accueillir chez moi durant quelques semaines, le temps d’organiser sa vie autrement et de repartir sur de nouvelles bases. Claudine refuse, arguant que Roger prendra conscience qu’il est allé top loin. Je lui coupe la parole : « Non, il me comprendra pas. Il faut un coup d’arrêt, marquer le coup ! » -« ? » - « Laisses-moi faire. Reste chez moi aujourd’hui, ou allons nous promener. Nous reviendrons chez moi ce soir. Ce soir j’irai voir Roger, ton mari. Je lui expliquerai que tu as un léger ennui, pas très grave ; que tu es allé voir un médecin, que tu es chez moi pour te reposer jusqu’à demain. » Sans trop y croire, Claudine se laisse convaincre. La journée se passe en lèche-vitrines.

Nous dînons légèrement et je vais sonner à la porte de Roger. Il est là, inquiet de ne pas voir son épouse Claudine à la maison. Je le rassure immédiatement. Avec un air le plus sérieux du monde, je lui raconte une baliverne soigneusement préparée : « Claudine ayant de fortes douleurs aux fesses, je l’ai accompagnée voir un médecin qui a diagnostiqué un état sérieux ; et, constatant des coups et blessures volontaires, a dit qu’il était de son devoir de dénoncer la chose à la police. Claudine a eu beaucoup de mal à l’en dissuader. » Roger fit semblant de prendre cette fable pour argent-comptant. Sur un ton réfléchi, il dit simplement « je comprends, je crois que je suis allé un peu trop loin… » ; puis, il m’invite à partager un Whisky. « Puisque, désormais, Claudine est entre de bonnes mains, tes craintes, Agathe, et les siennes vont s’apaiser. »- « Les miennes, peut-être, mais celles de Claudine, je ne sais pas… » - « Ah, et pourquoi donc ? » - « Parce que, vois-tu, Roger, je crois que ton épouse est d’une nature masochiste. Sous prétexte de te faire plaisir, elle trouve son propre plaisir dans la soumission et la douleur que tu lui infliges. La preuve, c’est que j’ai eu énormément de mal à lui faire accepter que je vienne te voir et que je te parle. » - « Agathe, crains-tu que son masochisme, comme tu dis, n’ouvre tout grand la porte à une sorte de sadisme de ma part ? » - « Oui, Roger ; c’est ce que je crains, vraiment. Mais dis-moi, Roger, pour dissiper mes doutes et, je l’avoue, pour étancher ma curiosité, ta demande de sodomie correspond-elle, chez toi à un vague désir, à un simple prétexte pour abaisser Claudine, à un phantasme, ou à quelque chose de plus sérieux, à un geste nécessaire pour affirmer ta virilité ? »

Roger fut lent à me répondre ; il fit semblant de siroter son whisky ; finalement il m’avoue : « Pour parler vrai, chère Agathe, j’en ai honte, mais je ressens la sodomie comme un acte nécessaire pour rabaisser Claudine et me prouver à moi-même le dominant que je suis. » Sa franchise m’ébranle. Pour cacher mon trouble, je plonge mon nez dans mon verre de whisky. Je dois rougir un peu, car Roger me dis : « …ça ne va pas, Agathe ? Je t’ai choquée, n’est-ce pas !? » Je ne réponds pas. Je le regarde. Mes yeux parlent pour moi. Le mari de mon amie Claudine me perce à jour, j’en suis certaine. Mais je ne sais que dire, ni que faire. Mon esprit s’emmêle dans une bataille furieuse d’où jaillit une étincelle : sachant désormais ce que je sais de Roger, et ce que je connais de son épouse Claudine, l’un et l’autre vont se déchirer mutuellement ; et ce couple qui, le jour de son mariage, semblait si bien assorti, va sombrer dans une relation sanguinaire. Comment arrêter le massacre qui s’annonce ?

Sans me formuler clairement la réponse, je sais ce qu’il faut faire : que je serve, moi, Agathe, d’exutoire au phantasme de Roger. Réponse ambiguë ; je me cache à moi-même ma vraie motivation. En fait, au fond de moi, je jalouse Claudine, j’envie son mariage et son mari. Je suis en train de trahir mon amie d’enfance, mais je n’en ai pas immédiatement conscience. Ma trahison se fait intelligente et subtile. Comme si la chose allait de soi, je change de sujet et dis à Roger : « Je n’ai jamais vu votre chambre à coucher, peux-tu me la montrer ? » Je crois Roger suffisamment malin pour envisager la suite. Effectivement, il ne se trompe pas. Dans la susdite chambre, un peu romantique avec un grand lit ovale, je fais semblant d’admirer les meubles, je m’extasie devant le lit, éprouve avec le coude la résistance du matelas puis, d’un geste naturel, ma main droite va chercher mon string pendant que la gauche remonte ma robe. Je me place les genoux sur le matelas, cuisse écartées, front sur le matelas et tête serrée entre mes deux mains.

Roger semble ne pas comprendre. Il hésite. Je dis simplement : « Roger, puisque ton épouse te refuse son petit trou, venge-toi sur moi, je t’offre ma rosette. » Roger réfléchit un long moment, puis il dit simplement : « Attends ! Mais, avant tout, ne place pas tes mains vers ta tête ; mais plutôt, avec tes mains, écarte bien tes fesses ». Il disparaît, revient trente secondes plus tard avec un tube de vaseline, m’enduit le petit orifice, fait pénétrer un doigt, puis deux. Je ne sens rien pendant quelques secondes. Roger se masturbe. Lorsque son dard est prêt, il l’approche de mon cul. « Agathe, tu sais ce que je suis en train de faire… » Je ne réponds pas ; il enfonce son engin dans mon derrière, comme un énorme suppositoire. L’intromission me fait mal ; mais je ne dis rien. Pendant plus d’une minute, Roger fait jouer son outil viril dans mon orifice, puis décharge. Il se retire et disparaît dans la salle de bain. Pendant ce temps, je remets en place mon string et réajuste ma robe.

Nous nous retrouvons dans le salon. « Merci, dit-il simplement ». Je ressens une légère brûlure de mon anus ; mais en même temps monte en moi une intime satisfaction. Est-ce le contrecoup lointain du ressentiment de la défloraison brutale que Claudine m’avait infligée plusieurs années auparavant ? Je ne sais pas ; un psychanalyste le discernerait peut-être. Ce que je ressens, c’est plutôt la jouissance secrète de la trahison. En acceptant de son mari cette sodomie qu’elle ne lui a jamais offerte, j’accapare un peu ce qui lui appartient. Mes pensées sont immédiatement confirmées par une proposition de Roger : « Agathe, je ne sais pas quel sens tu donnes à ce que nous avons fait ensemble ce soir. Mais saches que, tant que tu accepteras de te substituer à Claudine pour me permettre de t’empaler comme je l’ai fait ce soir, je ne demanderai plus ce genre de service à Claudine, et ses fesses demeureront intactes. »

La proposition est on ne peut plus claire. Roger me propose sans détour de devenir sa maîtresse ; c’est-à-dire de trahir en permanence mon amie Claudine. Ce qui me plait dans cette proposition, c’est qu’elle ne fait pas intervenir les sentiments. Roger a parlé de « service » à lui rendre. Bien que ça me rabaisse au rang d’une prostituée pour un service sexuel que sa bourgeoise ne veut pas lui offrir, cela me convient ; d’autant plus que l’idée d’éviter à Claudine des coups de baguette sur les fesses donne une apparence généreuse à cette relation malhonnête. Nous prenons rendez-vous pour une nouvelle fellation. Huit jours plus tard, chez moi. D’ici-là, et dès demain, Claudine aura rejoint bourgeoisement le domicile conjugal.

 

Chapitre 7. La position de l’araignée

Cette sorte de contrat entre Roger et moi a duré plusieurs mois. Régulièrement, presque une fois par semaine, il venait chez moi en fin d’après-midi après le travail. Cette relation me convenait d’autant plus qu’elle excluait tout sentiment. C’était une sorte de « plan cul » au long court, à la manière des « plan quinquennaux » des anciens pays soviétiques. Nous n’étions intéressés que par la technique. Au début ce fut une sodomie, pratiquée d’abord avec prudence, position plutôt confortable, fesses écartées avec les mains, vaseline, etc. Puis les préparatifs devinrent plus sommaires. Sur un seul geste je me plaçais sur le lit ; et sans attendre, Roger m’enculait. De temps à autre, au moment d’éjaculer, il fourrait sa bite dans mon puits d’amour, ou dans ma bouche, ou sur mon corps, massant ma peau avec son sperme comme on la masse avec une crème hydratante. Chaque fois, nos ébats se terminaient par une « relecture » : chacun disait à l’autre non pas ses sentiments –le sujet était tabou- mais les sensations plus ou moins vivement ressenties.

Pendant toute cette période, mes relations avec Claudine se renforçaient de jour en jour. Elle était heureuse de la nouvelle tournure qu’avait pris son commerce sexuel avec son mari. Désormais, ils ne faisaient l’amour que dans la position du missionnaire, selon un rite bourgeois. Même les fellations s’estompèrent, et il ne fut plus question de sodomie. Claudine me savait gré de cette heureuse évolution, sans en connaître la vraie raison ; et elle ne savait comment m’en remercier. Elle ne se doutait manifestement pas de la transaction entre Roger et moi, de ma trahison qui lui valait ce confort inespéré.

La recherche des sensations les plus fortes et les plus subtiles nous conduisit, Roger et moi, à varier peu à peu les plaisirs. Le cunnilingus fit son apparition, se répéta de plus en plus souvent. J’y prie goût. On essaya la position de la courtisane : la femelle debout, légèrement penchée en arrière, les fesses appuyées sur le bord d’une table. Ne nous a pas convaincus la position dite de la déesse, l’homme assis, la femme plantée sur la tige et entourant de ses bras le torse du mâle, car l’excitation ne peut venir alors que de la maîtrise des muscles sphincters de la femelle ; et je suis trop inexperte.

Roger me proposa un jour une position insolite, celle de l’araignée. Le corps de la femelle est horizontal sur le dos soulevé par les quatre membres. Les deux bras verticaux soutiennent les épaules, les mains appuyées sur le sol. Le fémur est horizontal dans le prolongement du bassin et de la poitrine. Les genoux sont pliés à angle droit de manière que les tibias soient verticaux. Les pieds reposent, comme les mains, sur le sol. C’est la posture dite « à quatre pattes » mais renversée. Le dos -et non pas le ventre- regarde le sol.

Cette posture inhabituelle est très fatigante, surtout si l’on veut tenir le ventre à bonne hauteur, buste et fémur horizontaux. Les muscles abdominaux sont à la peine ; on a l’impression que les fesses sont attirées par le sol. C’est pourquoi, afin de m’obliger à tendre le buste pour le garder horizontal et porter le ventre vers le haut, Roger eut un jour l’idée de placer sur le sol deux ou trois bougies allumées. Le corps fatigué se détend, le dos se rapproche du sol et se brule, provoquant un sursaut. Pour ressembler davantage à une araignée, il faut écarter les mains et les pieds. Ce n’est pas moins fatiguant ; mais ça donne une vision plus ressemblante, surtout si la tête, au lieu de regarder vers le ciel, se laisse tomber en arrière, ou si le cou est tourné de manière à ne montrer que l’occiput, vu du dessus, dans le prolongement de la poitrine.

La position de l’araignée est idéale pour recevoir un cunnilingus, l’homme s’approchant à quatre pattes, comme un chien, puisque la chatte de la femelle est alors à la hauteur de sa langue. Mais cette position est également propice à toutes sortes de sévices : notamment le matraquage de la chatte ; l’homme est alors soit debout, les deux jambes encadrant le corps de l’araignée, soit allongé entre les pattes de l’animal.

C’est dans cette position que Claudine nous surpris. Elle passait dans le quartier et voulu me saluer. J’avais oublié de fermer la porte à clef, elle avait sonné –ou cru sonner. Sans réponse, elle avait poussé la porte… et voilà ! Comme une furie, elle se précipite sur Roger allongé sur le dos sous l’araignée, lui arrache des mains la cravache qui lui servait à torturer ma chatte et, comme une folle, me frappe la poitrine de deux coups cinglants. Je hurle, l’araignée tombe sur Roger. Nous nous empêtrons bras et jambe tandis que Claudine continue à frapper dans le tas d’os et de chairs.

Finalement, Roger réussit à s’extraire de la mêlée et ceinture Claudine ; j’enlève la cravache des mains de Claudine qui continue à gesticuler comme une forcenée ; elle tape des pieds en tous sens. Pour la calmer, Roger décide, sans m’en parler, de traîner Claudine jusqu’à la salle de bain, lui met la tête dans la baignoire et l’asperge d’eau froide avec la pomme de douche. Une minute plus tard, un peu de calme est revenu dans la salle de bain inondée de toutes parts.

Les premiers mots prononcés par Roger visent l’apaisement : « Claudine, calme toi ; ce n’est pas la fin du monde. » - Claudine rugit à nouveau ; des mots incohérents éructent de sa bouche. Ce qui fait réagir Roger : « Si te faire laver la tête à l’eau froide ne te suffit pas, il te faut un bain glacé. » Joignant le geste à la parole, Roger ouvre le robinet d’eau froide de la baignoire et attend, tout en maintenant Claudine dans ses bras musclés. Deux minutes plus tard, Roger s’adresse à moi : « Agathe, aide-moi à plonger cette vipère dans l’eau froide » Après un instant d’hésitation, j’obtempère. Claudine est maintenant maintenue dans l’eau froide : elle est tout habillée ; elle gigote encore, mais moins violemment. Finalement, après quelques minutes de ce traitement, elle s’apaise.

Je vais chercher une serviette. Claudine, comme si elle avait été seule dans sa chambre, se déloque, se sèche, puis s’enveloppe dans le peignoir que je lui prête. Je propose un grog réconfortant. D’un geste du menton, Claudine accepte. Silence. Roger alors, d’une voix malhabile, tente de se justifier : « Vois-tu, Claudine ; malgré l’apparence, il n’y a rien entre Agathe et moi, du moins rien d’affectif. Nous ne sommes liés que par une sorte de curiosité intellectuelle à la recherche de sensations corporelles nouvelles. » Je fais chorus : « Depuis le fameux soir où je suis allée sermonner Roger qui t’avait meurtri douloureusement les fesses parce que tu n’avais pas voulu accepter une sodomie, il ne t’a jamais plus rien demandé de ce genre, n’est-ce pas ? » Claudine fit ’oui’ de la tête. « Eh bien, c’est parce que j’avais accepté, moi, Agathe, de me substituer à toi pour qu’il puisse assouvir son phantasme. »

Une longue minute passe dans le silence. Soudain, je vis le visage de Claudine s’empourprer, comme pris par une idée lumineuse et emporté par une énergie nouvelle. Elle ouvrit la bouche et prononça avec une détermination froide ces paroles qui sont restées gravées dans ma tête : « Agathe, je ne veux plus que tu continus ainsi. C’est à moi d’assouvir les phantasmes de mon mari. Désormais, Roger n’aura plus besoin d’aller chercher ailleurs. » Et, se tournant vers son mari : « Roger, nous sommes mariés ; mon corps t’appartient ; à partir d’aujourd’hui tous mes orifices te sont accessibles, uses-en comme bon te semble. Surtout, ne me demande jamais si je veux ou si je ne veux pas. Ma volonté, c’est la tienne. Que tu veuilles faire de moi ta princesse ou ta chienne, cela ne regarde que toi. Ne te préoccupe ni de mes sentiments, ni de mon plaisir, ni de ma douleur, ni de mes cris, ni de mes angoisses. Si je gesticule trop, attache-moi. Si je hurle trop, bâillonne-moi. Si je n’obéis pas assez vite, punie-moi. » Puis, comme dans un rite religieux, Claudine se leva, fit quelques pas pour aller ramasser la cravache qui gisait encore par terre. Dans un geste solennel qui m’impressionna, elle mit la cravache entre les mains de Roger, fit tomber de ses épaules le peignoir qui couvrait son corps nu, se positionnement ainsi devant son mari : elle écarta les jambes, croisa les mains derrière la tête et attendit les coups par lesquels Roger signifierait qu’il acceptait l’offrande (en moi-même je pensais le sacrifice, que je jugeais un peu grandiloquent) de Claudine.

La suite ne se déroula pas comme je m’y attendais. Roger, doucement, ramassa le peignoir, en revêtit tendrement Claudine ; il me demanda si je ne pouvais pas me défaire de l’une de mes robes, car celle de Claudine était trempée. Claudine une fois rhabillée, gentiment, Roger saisit son épouse par les épaules, me dit au revoir, et, oubliant délibérément la cravache sur un siège de ma salle de séjour, emmena sa douce moitié vers le foyer conjugal. Je ne les ai jamais revus.

FIN

 

 

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