Histoires Des Invitées
Framm 7
Arkann
Javais quelques jours de vacances
et javais décidé
de les utiliser à bon escient. Je me regardais dans le miroir.
Madmirais, vraiment. Un trench-coat qui mallait comme
un gant, mais me donnait un air un peu sinistre, surtout avec la
gueule que je faisais, une mine patibulaire que jutilisais
seulement lorsque je voulais dissuader, ou que jétais
en rogne. Le halo flottant au-dessus de ma tête était
très noir, semblait mentourer de pénombre.
Excellent.
Je sortis de mon appartement, prenant soin de laisser une marque
qui mindiquerait que la porte avait été ouverte
si quelquun louvrait en mon absence. Pas une très
bonne précaution, Iblis ayant montré quelle
était aisément contournée, mais mieux que rien.
Un corridor, puis un autre. À mon passage, deux chiens se
mirent à gémir, se faisant petits, la queue entre
les jambes. Les passants me laissaient le chemin. Des portes à
droite, des portes à gauche.
Alem était de service, il se tourna, blêmit un peu,
sassura de ne pas attirer mon attention. Jétais
amusé. Alem était le genre de salaud qui aurait allègrement
volé la dernière pièce de monnaie dans la gamelle
dun aveugle mendiant, et jadorais le voir réagir
ainsi.
Javais une certaine distance à parcourir pour atteindre
la bonne zone. Tout était prêt. Milène ne se
doutait de rien.
Le Zoccalo, un quartier mal famé dun habitat à
une certaine distance du mien. Ils étaient rares les habitats
qui navaient pas au moins un quartier comme celui-la, ou lindustrie
du sexe était concentrée, à tout le moins pour
ce qui était des « services » à
prix modiques. Cest dans ce quartier que Milène avait
établi la personnalité de sa prostituée. Il
ny avait quun seul client moi- avec qui elle avait
des relations sexuelles, mais elle me racontait tout. Elle adorait
ce rôle, marcher les corridors, exhibée de manière
provocante comme une marchandise un peu trop fatiguée. Elle
arrivait à se glisser dans la peau de son personnage, à
en savourer les humiliations, la dureté. Elle avait eu des
problèmes au début avec les autres filles, puis avec
les proxénètes, mais à part de certains clients
voulant aller avec elle, personne ne lui faisait plus aucun problème.
Mon emploi actuel me permettait certaines dépenses. Javais
les contacts.
Le Zoccalo. Aucune des prostituées ne maccostait,
ou tentait dattirer mon attention. Elles présumaient
que mes goûts étaient du genre à éviter.
Presquaucune. Il y avait celles qui étaient trop droguées
pour sen faire, ou encore trop désespérées
pour laisser passer un client potentiel que personne dautre
ne voulait. Il y avait celles qui, menacées par un proxénète
voulant établir une communication avec quelquun comme
moi, assurément bien connecté, venaient à moi
contre leur gré.
Milène me vit arriver de loin. Elle voyait toujours tout
arriver de loin. Je pouvais sentir son anticipation. Ses voisines
de corridor lui dirent quelques mots, lair amusé. Milène
ne pouvait venir souvent
et la plupart des fois quelle
le faisait, je passais. Je savais que ces femmes devaient spéculer
énormément sur ceci. Elles devaient même avoir
deviné certaines choses.
Milène était habillé exactement comme je lavais
vue lors de ma planification originale. Des talons hauts, noirs,
une micro-jupe de cuir, et un top blanc, moulant ses formes. Trop
de maquillage, ou le noir était trop marqué, le rouge
à lèvre carmine trop dominant. Une mine blafarde et
pâle, comme un lendemain de veille. Ses cheveux, coiffés,
mais en désordre. Une vieille bourse de cuir, de qualité
mais faisant son âge. Accotée dos au mur, se tenant
debout sur une jambe, lautre pliée, talon aiguille
contre le mur sur lequel elle était accotée
ce qui faisait monter sa micro-jupe, révélait son
sexe à lil qui arrivait à imaginer ce
qui se cachait dans ces ombres.
Elle mavait dit comment elle adorait retourner dans les corridors,
prendre une telle position, après que jai fait usage
de son corps. Mon odeur sur elle, son sexe mouillé, dégoulinant
Jallai directement à elle. Une négociation
serrée, accompagnée de quelques épithètes
et commentaires insultants de part et dautres. Une expression
dure malgré le sourire quelle fixait en place, ses
yeux froids et calculateurs. Tout dans son expression, son langage
corporel, indiquait quelle me détestait
mais
quelle irait avec moi. Je sentais les yeux curieux des autres
prostituées, certaines offrant même quelques commentaires
désobligeants et suggestions indécentes. Je les ignorai,
mais Milène leur donna un bras dhonneur bien senti,
ce qui les fit rire.
Le marché conclu, elle me mena à ce trou à
rat ou elle louait une chambre. Un escalier délabré
et sombre, ou lodeur de moisi, durine et de sexe régnait.
Les murs minces laissaient passer les sons provenant de plusieurs
chambres occupées. Sa chambre
sa chambre était
autre. Oh, rien de remarquable de prime abord, mais les lieux étaient
toujours propres, les draps impeccables, et elle avait sa propre
chambre de bains. Le couvre-lit était vieux, mais présentable,
et portait un motif comme une peau de léopard.
Milène était alerte, mais pas assez. Elle ne me vit
pas sortir linjecteur de ma poche. Il y avait une grosse aiguille
à lintérieur, le genre daiguille à
faire peur, faite pour ne pas casser si elle rencontrait un os,
et un gros ressort. Une fois la sécurité désarmée,
une application rude contre la cuisse suffisait à déclencher
le mécanisme.
Milène nétait pas assez alerte
mais elle
était alerte. Javais à peine utilisé
linjecteur que je recevais un violent coup de coude. Elle
se tourna, tenta de masséner un coup de pied, mais
jétais déjà hors de portée. Elle
tituba, ouvrit la bouche pour crier
et seffondra.
Javais lantidote, au cas ou, et je vérifiai
son pouls et sa respiration, mais tout était beau. Elle était
encore consciente, et je lui donnai un sourire. « Alors,
ma petite garce. Quest-ce que ça te fait davoir
un souteneur, maintenant? » Je lui dit, lui rappelant
cette fois ou elle avait décliné mon offre de protection.
Je lui soutirai ses armes, puis la tournai, afin de menotter ses
poignets derrière elle. Leffet du paralysant devait
durer un certain temps mais, avec un paladin, mieux valait ne pas
prendre de chance.
« Tu ne réponds pas? Dommage. Nous pourrions
avoir une belle conversation, jen suis certain. Je sais
tout de toi, tu sais. Tu me coûtes cher, très cher
et tu mas fait des menaces, il ny a pas si longtemps.
Et puis, il y a toutes ses semaines ou je nai pas fait de
profit avec toi. Beaucoup de rattrapage. Ta dette est donc élevée.
Mais ne craint pas, je vais te donner du travail, une chance de
me repayer. » Oh, mais que jétais allègre.
Je sentais la colère, la furie de son personnage
et
le plaisir coupable de Milène. Des chaînes à
ses chevilles, reliées à ses menottes. Elle ne pourrait
utiliser ses jambes pour me faire un coup foiré quelconque.
Puis un masque couvrant sa bouche, bien attaché, afin de
mieux la désarmer.
Je guidai ses doigts au bouton dans ses menottes. Elle navait
quà presser, et tout tomberait. En cas durgence,
il lui fallait pouvoir se libérer. Puis je lui donnai lantidote,
et elle commença à se débattre, quelques instants
après, criant dans sa muselière bien serrée.
Pas parfait, mais les sons nétaient pas assez forts
pour être inquiétants. Pas autant que la manière
avec laquelle elle frappa son corps contre le mur pour attirer lattention,
me forçant à la maîtriser.
Je lui montrai mon arme, un tazer que je tenais dans une main,
et elle cessa immédiatement. Il était modifié
pour ne donner quun petit choc, ne pas incapaciter, mais elle
tiendrait son rôle si jen faisais usage.
« Tu tappelles Amira, maintenant, »
je lui dis, « et tu travailles pour moi. En lumière
des menaces faites il y a un temps, et du respect que je te porte,
je vais tapprendre à trop me craindre pour penser me
faire des choses
ennuyeuses. » Je ne me rappelais
que trop bien de la sensation de son couteau appliqué contre
mes couilles.
Son regard venimeux me promettait de telles choses, si je lui laissais
une seule chance. Si elle arrivait à avoir la main haute,
elle ne dépasserait pas certaines bornes, mais jétais
loin dêtre le masochiste quelle était,
et je savais fort bien quelle me ferait regretter davoir
baissé ma garde.
On cogna à la porte. « Mazurka. »
Le mot mindiquant qui cétait, que tout était
en place. Sortir une fille du Zoccalo contre son gré pouvait
être un exercice périlleux demandant préparation :
ce qui se passait dans le Zoccalo ne regardait pas la police, mais
un policier frustré et zélé, surveillant les
abords
**
Javais de largent, maintenant, et largent était
fait pour être utilisé. Un petit appartement, moderne,
confortable, et bien meublé. Une fortune, mais
Amira
allait me permettre de payer tout ceci, donner vie à ce personnage
fait juste pour elle.
La sortir du Zoccalo avait pris plus de temps que prévu,
mais tout cétait bien passé. Elle était
couchée sur le côté sur le lit, me regardant
avec une méchanceté presque palpable. Je prenais grand
plaisir à tout ceci. Ça me surprenait. Peut-être
était-ce une manière honorable pour moi de jouer les
méchants, de suivre cette nature qui était mienne,
que je devais réprimer le reste du temps.
Jouvris une boîte sous ses yeux, pour lui révéler
un collier Zaltais. Très rare, profondément illégal.
Ses yeux sécarquillèrent, et elle blêmit.
« Je vois que tu sais ce que cest. Tu vois, je
sais que tu en vaux la peine, le risque. Je sais beaucoup. »
Je mapprochai pour lui glisser le collier autour du coup,
mais elle résista, me força à utiliser le tazer.
Elle joua son rôle.
Le collier était élégant, une vraie uvre
dart de métal ciselé. Lintérieur
était dun cuir se moulant aux formes de son cou, le
couvrant presque complètement, le collier émettant
un clic très audible lorsquil se barra en place. Il
lui allait parfaitement. Très élégant. Cétait
aussi une coquille vide : je métais assuré
que tous les mécanismes à lintérieur
étaient bien enlevés, et javais ajouté
un petit dispositif qui lui donnerait un tout petit choc si le collier
était un jour activé.
Je la libérai de ses chaînes et menottes. Elle « reprit »
contrôle delle-même, jouant son rôle plutôt
bien. Si je navais pas su, les spasmes et mouvements incontrôlés
mauraient convaincu.
« Ce que tu as autour du cou, cest un collier
Zaltais. Il est utilisé pour forcer la coopération.
Si tu tentes de lenlever, de le couper, de le détruire,
il te tuera. Si tu tentes de tenfuir où tu téloignes
hors de la zone où il test permis daller, il
te tuera. Si je presse ce bouton, il te tuera. » Je tenais
bien haut un objet qui ressemblait à un briquet, le couvercle
enlevé, révélant le bouton rouge. « Si
je nentre pas un code spécifique à chaque jour,
ton collier te tuera. Si je meurs, il te tuera aussi. »
Elle était capable dy toucher
y allait très
délicatement, la crainte visible sur son visage. Milène
le paladin savait comment se débarrasser sécuritairement
dun tel collier, mais pas Amira la petite prostituée.
« Je te serai un bon souteneur, Amira. Tu vaux infiniment
plus vivante que morte, et de bon gré que de mauvais gré.
Tu es une prostituée à cinquante ducats, »
je lui dis, avec mépris, « alors quavec
moi, tu peux être une escorte à mille ducats, sans
même avoir à coucher avec ton client. Tu vois, je sais
que ton père était un ange, que tu peux porter lauréole
si tu le désires vraiment. Le collier fait de toi mon esclave,
mais je veux que notre relation daffaires soit
consensuelle.
Le quart de ce que tu fais, moins mes dépenses dopérations,
et le remboursement de ta dette, ira dans tes poches. Même
avec mes frais, ce sera bien mieux que la minable vie qui était
tienne avant que je te tende la main pour te sortir de ta misère. »
Un ton paternaliste, empli de bonté.
Elle leva la tête, défiante, arrivant à sasseoir,
massant son bras ou javais utilisé larme. « Non. »
« Tu es plus intelligente que ça, Amira. De toute
manière, si tu le pensais vraiment ce non, tu serais déjà
en train dessayer de métrangler. Mais je serai
bon prince. Je désire ta coopération, ta bonne volonté.
Tu pourras garder pour toi la moitié des pourboires qui te
seront donnés. » Je laissai mon expression sassombrir,
« la moitié. Si tu me trompes sur ce point, tu
verras mon côté moins plaisant. » Une voix
pleine de sérieux, de menace. Elle leva la tête avec
défiance. Elle allait devoir être disciplinée,
en cours de route. Un point pour plus tard. Je laissai mon ton sadoucir,
« tu auras un budget, pour ta garde-robe, ton maquillage,
cet appartement, tes dépenses professionnelles
»
Elle me donna un reniflement dédaigneux, « et
tu paieras ce budget? »
Mon sourire sélargit. « Oui. Les dépenses
seront ajoutées à ce que tu me dois, bien entendu,
que tu utilises ton budget ou non. Je voudrai bien entendu les reçus
afin de massurer que tu dépenses largent tel
quil doit lêtre. »
Son regard était venimeux, mais elle ne dit rien.
« Cest une ère nouvelle, Amira. Toi et
moi, dans les quatre prochains jours, nous allons
travailler
ensemble. Tu as plusieurs rendez-vous pour améliorer
ta diction, ton apparence, tes manières. Des services professionnels
coûteux, mais je mattends à ce que tu puisses
repayer ces dépenses rapidement. Tu seras une fille différente.
Nous allons mettre lemphase sur ton petit côté
angélique. Lorsque je serai satisfait, un photographe viendra,
puis nous travaillerons sur ton site Web. »
La personne quelle incarnait était furieuse
mais je savais combien Milène elle-même était
excitée et enchantée. Avec cette nouvelle approche,
elle allait jouer un rôle descorte, pleinement, la seule
exception étant laspect sexuel. Ça, ça
me serait toujours réservé.
Framm 8
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