« Pour ma part, pas grand-chose
au sénat; le Duc de Ligonne, par les services du Comte dAuban,
a encore une fois tenté de faire dissoudre les règles dexception
sappliquant à Valan, mais il a échoué. Comme
toujours,
le Comte de Serveval et nos autres alliés ont bien défendu
notre cause. » La voix de Milène était neutre, et
aucune des quatre ne montrait rien, mais le harem en entier était
tendu, alerte, depuis quelques jours. Elles cachaient quelque chose.
Il fit comme si de rien nétait.
« Le Duc de Ligonne commence à mennuyer. Tes recommandations?
» Le Duc nen était pas à sa première
offense. Il était vrai que la relation entre Ligonne et Valan était
mauvaise pour des
raisons historiques.
La brunette secoua la tête un
moment. « Rien pour lui. Il est vieux, et aucun des nobles ne va
sérieusement penser à faire quoi que ce soit contre Valan
: ils se rappellent encore comment lEmpereur ta laissé
répondre au Baron de Castelbleu il y a vingt ans. Et puis il y
a nos alliés. Et sil le faut, nous pouvons altérer
Ligonne, ou simplement le tuer. Mais Sefera a plus important. Cest
terminé pour moi. »
Il tourna les yeux vers Sefera. Comme
toujours, la femme à la peau noire et au menton prononcé
était vêtue de cuir, un cuir souple et moulant dont seule
elle avait le secret. Elle nétait pas aussi belle que les
autres, dans le sens classique du terme, mais son menton et son expression
lui conféraient un air batailleur, fonceur, quil appréciait.
« Jai retrouvé les
bandits qui ont attaqué notre caravane le mois dernier. Une auxiliaire
se charge deux et de sarranger pour que le facteur récupère
la marchandise. Tu auras les résultats la semaine prochaine. »
Il hocha de la tête. Ses propriétés,
ses caravanes, ses navires étaient toujours marqués du cheval
de sable cabré sur champ dargent. Les bandits et pirates
qui sy attaquaient ne méritaient que de servir dexemple
aux
autres pour leur cupidité imprudente. Ils étaient rares,
ceux qui pouvaient se vanter davoir échappé à
sa juste vengeance.
Sefera continua, lui débitant
une kyrielle de petits événements ennuyeux qui méritaient
dêtre mentionnés, mais sans plus.
Puis elle arriva à la pièce
de résistance. « Il y a des rumeurs que tu es un vampire.
Nous sommes en train de remonter à la source de cette rumeur, mais
comme toujours, cest une rumeur tenace. »
Il soupira. « Tout, mais pas
une de ces saletés de vampire ou démon. » Puis, «
il y a eu des cadavres, je présume? »
Le pincement des lèvres de Sefera
était toute la réponse dont il avait besoin, mais elle répondit
de manière exhaustive. « Oui. Une vingtaine dans la région
pour la dernière année, portant les marques habituelles,
chaque corps drainé de son sang. Nous avons une auxiliaire qui
glisse. »
« Qui glisse, et qui pisse dans
leau quelle boit, » dit-il, fâché. «
Que dit Léanne? » Léanne était lauxiliaire
senior en charge des autres.
« Elle jure que ce nest
pas luvre de lune des nôtres, mais jai placé
chaque instance sur une carte, et Valan est lépicentre. Ou
bien nos auxiliaires ne font pas bien leur travail, ou bien nous avons
une auxiliaire qui glisse. »
Il ferma les yeux. Chaque auxiliaire
était triée sur le volet pour son contrôle, et arrivait
à bien se nourrir en nutilisant que les émotions des
cauchemars et autres rêves forts en émotions qui pouvaient
être exploités à
partir du monde des ombres. Chacune avait démontrée son
aptitude à manipuler les rêves des simples mortels afin de
cuisiner un plat délicieux et nutritif. Malheureusement, il arrivait
parfois quune delle glisse et
retourne à une forme plus primitive de subsistance.
Trois raisons faisaient quil
prenait cela au sérieux : les victimes étaient ses sujets,
chaque fois que des rumeurs de vampire circulaient, son nom se retrouvait
mêlé à tout ça, et il arrivait parfois quun
paladin ou autre bienfaisant compulsif tente de mettre fin à la
menace soi-disant posée par Arkann.
« Bon. Trouvez qui a fait ça.
Je déciderai quoi faire quand on saura qui. Pour ce qui est de
Léanne, cest le dernier dune série de manquements.
Je ne suis pas heureux, mais alors la, pas du tout. Je vais la voir lorsque
vous aurez trouvé qui est notre soi-disant vampire.» Il pianota
la table de ses doigts, puis, « ensuite? »
« Cest tout. » Sefera
était la dernière. Sa voix était calme, mais il la
connaissait bien.
Il regarda chacune dans les yeux. «
Êtes vous certaines? »
Elles lui répondirent par laffirmative,
de manière un peu trop décontractée.
Sa moue de déplaisir parla pour
lui. Milène fit mine de se lever pour partir, mail il la fusilla
du regard. Un long silence suivit. Elles étaient coincées,
et aucune ne voulait être la première à ladmettre.
« Milène. Crache. Pas
de plan B ou C. La vérité. » Sa vie il pouvait leur
confier en toute tranquillité, mais pour le reste
Milène était nerveuse,
chercha le regard de Sefera pour confirmer son support, mais celle-ci
et les autres- évitaient studieusement de rencontrer ses
yeux. Elle neut dautre choix que de se mettre à table.
« Aramis a tenté de tassassiner.
» Sa voix était coupante, trahissait sa colère. Et
maintenant que le chat était sorti du sac, les autres navaient
plus besoin de camoufler leur propre fureur.
Aramis, le nom de son destrier, donné
à un animal en lhonneur de lautre Aramis, son frère
jumeau, son ennemi juré, qui lavait condamné à
lexil lorsque le harem dAramis et dArkann sétaient
ligués contre lui pour
lempêcher de mettre Arkann à mort à lissue
du combat qui les avait opposé.
« Ah? Les détails, sil
vous plaît
»
Les détails coulèrent.
Un plan simple, et élégant. Un poison très pur, très
raffiné, ne visant que leur espèce, dans une bouteille de
porto de grande rareté, par lintermédiaire de plusieurs
marchands. Aramis savait
combien Arkann aimait le porto. Il avait réussi à déjouer
son propre harem, à faire parvenir cette bouteille probablement
plusieurs- à Valan, et lune de ces bouteilles avait été
achetée par le harem pour Arkann. Le poison avait été
détecté lors dun test de routine qui avait été
instauré par le comité de sécurité il y avait
de cela longtemps.
Il était amusé par la
véhémente colère des quatre. Elles étaient
au tiers fâchées contre Aramis, au tiers contre la grande
incompétence de son harem, et au tiers contre Arkann,
par principe général.
Si elles avaient été
au courant des plans quil fourbissait, des appâts quil
avait posé pour piéger et tuer Aramis, elles auraient peut-être
été moins promptes à dénoncer le manque dhabileté
de son harem à détecter et contrer ses actions. Un jour,
il tuerait Aramis, retournerait de son long exil, et reprendrait ce qui
était sien.
Soudainement, il se sentit de bonne
humeur. Ses compagnes étaient frustrées et outrées
par son attitude débonnaire, mais la vision dAramis tombant
dans lun de ses pièges était trop aguichante. Milène
et Sefera savaient à quoi il pensait, et limpuissance les
rendaient farouches. Ces deux la, il les trouvait encore plus belles quand
elles étaient effarouchées.
« Bon, » il dit, éventuellement,
coupant les arguments qui fusaient de tous bords. « Je me fous un
peu du harem dAramis. Ce qui importe cest que vous avez bien
fait votre travail. Je ne suis pas heureux lorsque vous me
cachez de telles choses, mais je serai bon prince et le harem entier va
obtenir un gage de mon appréciation. » Cétait
une promesse coûteuse, mais elle serait répartie sur une
période raisonnable. Les quatre femmes
sourirent, mais elles savaient que maintenant quArkann savait, il
ne serait que plus motivé à assassiner Aramis. Si cela venait
à se passer, non seulement un précieux male de lespèce
mourrait, mais le harem dAramis tenterait sûrement de prendre
Arkann par la force, et elles savaient très bien que lautre
harem était plus puissant.
Il se leva. « Si vous avez besoin
de moi, je serai dans mon laboratoire. »
**
Au sortir de son bureau ce soir la,
il y avait deux femmes de plus; Léanne, et Ariane, une jeune auxiliaire.
Les deux portaient une longue tunique blanche descendant aux genoux, pieds
nus, sans pantalons. Le harem et les auxiliaires avaient une relation
tendue : le harem avait besoin des auxiliaires pour les nombreuses tâches
routinières et la surveillance contre les intrus, alors que chaque
auxiliaire convoitait une place dans le harem, que la plupart nobtiendrait
jamais. Le harem détestait avoir une auxiliaire en présence
dArkann, et faisait tout pour les humilier et les rendre peu attrayantes,
en prenant soin de ne pas pousser trop loin, car Arkann aurait imposé
des règles.
Ce soir, le harem regardait avec intérêt,
sans crainte, car si Léanne était accompagnée, cela
voulait dire quAriane était celle qui avait bu le sang des
sujets dArkann.
« Cest une surprise, »
dit-il à Ariane, qui baissa les yeux, pleine de honte, frémissant
de peur dêtre bannie des auxiliaires. Ariane était
jeune, pleine de promesse, de fougue, de talent quil désirait
guider et faire croître. Manifestement, elle navait pas le
contrôle requis. Cétait une grande déception.
Léanne était manifestement
nerveuse, « Maître. Ariane est celle qui a trahi ta
confiance. Je saurai la punir et faire quune telle chose ne se reproduise
plus. »
Les mains dAriane formèrent
des poings, et Arkann savait quelle bouillait, intérieurement.
Une bonne Auxiliaire-chef savait protéger et discipliner celles
qui étaient sous son commandement et Arkann savait que, sur ce
point Léanne était bonne. Il y avait certaines autres qualités
requises, et Léanne ne les avaient pas toutes. Par tradition, les
auxiliaires choisissaient leur chef.
Les deux étaient profondément
conscientes que leur position était extrêmement précaire.
Bannir une femme du harem était dangereux. Bannir une femme du
rang de ses auxiliaires était chose simple, et il ne se gênait
pas.
« Mon premier réflexe
est de vous bannir toutes les deux. Vous avez deux choix : vous pensez
pouvoir me faire changer davis, et je vous donne toute la nuit pour
me convaincre, ou vous partez maintenant. » Si lune delle
restait, il la dépucellerait sans vergogne. Ils étaient
rares les males qui laissaient une femme qui nétait pas vierge
joindre ses auxiliaires. La virginité était un atout considérable.
« Maitre! » sexclama
Léanne. Ariane, pour sa part, le regardait avec une malice à
peine voilée. Il ne bannirait pas celle qui jouerait tout, mais
elles ne le savaient pas.
Dix minutes de supplications et de
promesses. Il nallait pas bouger, il le savait, mais il avait été
parfois surpris par le passé et sétait laissé
convaincre malgré une position bien définie. La surprise
nétait pas au rendez-vous ce soir la. Lorsque Léanne
menaça de monnayer ses connaissances à Aramis, lhumeur
dArkann prit une mauvaise tournure. Elle lui ferait mal, mais jamais
il ne céderait au chantage, pas lorsque celui-ci impliquait
Aramis.
Deux femmes du harem la saisirent et
la forcèrent hors de sa présence, en réponse à
un simple geste de sa part. Elle tenta bien de résister, mais elle
navait aucune chance contre des femmes avec qui il avait partagé
ses secrets.
« Que dis-tu, Ariane? »
Elle était pâle. Elle
savait ce quétait la vie hors des rangs des auxiliaires.
Elle ne voulait pas y retourner. Elle ne voulait pas non plus perdre son
atout principal.
« Banni-moi des auxiliaires,
Arkann. Jirai voir Aramis. Je tenterai de devenir lune de
ses auxiliaires. Promets-moi que tu me prendras directement dans ton harem
lorsque je reviendrai, sans condition, et je te livrerai les secrets dAramis.
»
Une offre intéressante, une
offre malheureusement beaucoup plus courante quelle ne le pensait,
et il avait ses espionnes, comme Aramis avait les siens. Sans compter
celles qui jouaient les deux bords à la fois.
« Cherche plutôt à
tintroduire parmi les auxiliaires dAnteram. Si tu y parviens,
si les informations sont de qualité, si tu as appris à te
contrôler, si tu mintéresses toujours, je considérerai
dun bon il ta pétition pour entrer dans mon harem.
Si tu ny parviens pas, je te
reprendrai parmi mes auxiliaires si tu le veux, après tavoir
déflorée. » Anteram était un autre male, très
jeune, un ennemi à éliminer tout comme Aramis, mais beaucoup
moins personnel.
« Sans condition, Maître,
» Ariane dit, poussant sa chance.
« Jai dit, » répondit
Arkann, la regardant dans les yeux. Cétait une bonne offre.
« Très bien, Maître.
Jaccepte. » Sa voix était nuancée par la tristesse,
la colère et la crainte. Elle se retira de sa présence.
Avec plus de contrôle sur elle-même, une meilleure compréhension
des limites à ne pas franchir, et la connaissance des conditions
offertes par dautres males, elle redeviendrait intéressante.
Ce qui le laissait avec une certaine
humeur déplaisante et un besoin inassouvi. « Milène.
Fais circuler dans le monde des ombres que je cherche deux solides auxiliaires.
Laisse leur savoir que les pouliches que je choisirai, jen ferai
des juments, sans aucune promesse ou considération particulière
de ma part autre que den faire des auxiliaires. »
Milène, qui sétait
rapproché en prévision de son ordre, répondit, «
tu nauras pas le choix habituel. Cest beaucoup demander delles
quelles te sacrifient leur virginité sans contrepartie. »
Son ton était désapprobateur.
« Quimporte. Je nai
jamais le temps de passer au travers de la moitié des pétitions.
Ça va faire changement. »
« Tu vas avoir les désespérées,
celles qui nont plus aucun autre choix. Même avec ça,
elles ne seront pas beaucoup. »
Il sourit. « Peut-être.
Et puisquelles ne seront pas nombreuses, laisse
leur savoir que le harem ne filtrera pas les pétitions. »
Milène prit une profonde inspiration,
contrôla sa colère montante, puis, « Arkann, il est
de notre droit de filtrer afin de taider à choisir, pour
préserver lharmonie chez les auxiliaires. »
« Droit? Parle plutôt de
tradition demandant à être rompue. Je serai bon prince, et
je vous laisserai vous opposer à mes choix si vous trouvez de bonnes
raisons. Comme ça, vous ne perdrez aucun droit. »
Elle allait tourner la tête pour
chercher du support parmi ses consoeurs, et il prit son menton entre ses
doigts. Il utilisa aussi ses pouvoirs pour lempêcher de communiquer
avec les autres.
« Topposes-tu à
ma volonté? » il lui demanda, froidement. Les autres la suivraient,
ou non. Après le bannissement de deux auxiliaires, avec la mauvaise
humeur quil montrait, il savait que les autres agiraient avec une
grande prudence.
Milène serra les dents. «
Non, O mon illustre Maître, » elle dit, sa voix débordant
de sarcasme, « tu auras tes vierges prêtes à voir leur
sang versé pour un gain mineur. » Rageusement, elle mit la
main sur le bras dArkann,
et se libéra.
« Je commence dans une heure.
»
« Cest court, O mon Maître.
Très court. Trop court. Donne leur une journée, au moins.
Et nous, nous devons nous préparer. » Les femmes du harem
voulaient apparaître dans leurs plus beaux autours, en imposer à
celles qui viendraient quémander une place.
« Une heure. Celles qui nont
pas une pétition en mon nom déjà prête ne veulent
pas le poste avec une ardeur suffisante. » Avec de tels délais,
le harem naurait pas le temps de filtrer les pétitions derrière
son dos.
« Arkann! Tu vas nous humilier!
» Elle était honnêtement fâchée. Plus
un male était convoité, plus un harem était prestigieux,
et plus grande était linfluence des femmes de ce harem parmi
la communauté de leur espèce. Une
faible réponse à loffre dArkann, aussi outrageuse
soit-elle, signifierait une perte de prestige, une perte de leur influence.
« Cest moi qui en serai
le plus humilié, » lui dit-il, sen foutant éperdument.
Même lorsquil était jeune, sans expérience,
sans envergure, sans réputation, il avait toujours trouvé.
Cette nuit, il se taperait deux vierges motivées envers lesquelles
il naurait aucune obligation. Il
nétait pas du genre à ne pas leur donner un avantage
marqué, mais lillusion davoir la liberté dagir
comme bon lui semblait était aguichante.
« Arkann, la dernière
fois que- » Milène commença, mais Arkann la coupa
court.
« Je me rappelle. Si vous voulez
me renverser, allez-y. Allez-y fort. Mais ne me manquez pas. Je ne suis
pas de bonne humeur. » Cétait un coup de dé,
mais il pariait que le harem nétait pas assez uni. Et il
semblait avoir raison.
« Si tu veux une vierge, Arkann,
je suis ici. Je te veux. Je te désire. Maintenant. » Cétait
Maya, qui savançait, vêtue de sa coutumière
robe blanche. Plus dun an au harem, et il ne lavait pas encore
touché. Cétait un effort, mais trop peu.
« Un autre jour. Tu as tes ordres,
Milène. » Sans plus attendre, il sortit de la librairie.
Il venait de jeter un pavé dans la marre tranquille du harem, ce
qui était un exercice périlleux, mais toujours excitant.
La prochaine heure serait déterminante.
Il se prépara, car tenir cour
était une occasion formelle. Heureusement pour lui, il navait
quà se mettre les vêtements appropriés et à
attacher son baudrier dépée. Il sadmira quelques
instants dans le miroir, amusé :
celles qui viendraient porteraient lapparence humaine, mais cette
apparence ne les intéresserait pas. Cest son apparence réelle
qui comptait, visible à partir du monde des ombres. Il jeta un
coup dil, et cacha un sourire.
Pas mal. Encore quavec sa réputation, second seulement à
celle dAramis, lapparence physique elle-même navait
quune importance secondaire face au pouvoir et à la connaissance
quil pouvait conférer.
À lheure dite, il entra
dans la grande salle à manger qui avait été rapidement
dégagée de ses tables et chaises par les servants. Toutes
les lampes étaient allumées, et un grand feu brûlait
dans le foyer. Il ny avait quune seule chaise, et la peau
dun énorme tigre était étendue devant
la chaise. Tel était le compromis quil avait atteint avec
le harem, qui aurait aimé avoir plus : il avait passé lage
où il sentait le besoin de sortir de son chemin pour impressionner.
Quelques unes des femmes du harem étaient
présentes, mécontentes du peu de temps quelles avaient
eu pour se préparer. Elles étaient déjà pas
mal prêtes, lattendant avec espoir au sortir de son antre
comme à chaque soir,
mais les critères se resserraient énormément lors
dune occasion formelle. Il jeta un coup dil au travers
du monde des ombres et les reluqua de longs moments, car elles étaient
à leur meilleur. Il soupira. Il évitait
habituellement de regarder, de se tenter, car le monde des ombres et sa
forme réelle lui étaient interdits.
Dautres femmes arrivèrent
en courant, poussant des jurons bien sentis et associé à
son nom. Elles étaient toutes mécontentes, et navaient
pas à sinquiéter de le voir les discipliner car il
aurait eu à les punir toutes,
ce qui aurait demandé trop defforts. Quelques minutes de
plus et elles étaient toutes présentes, bordant les deux
cotés de la pièce.
Milène vint, accompagnée
de deux servants portant entre eux un coffre dacajou, quils
déposèrent à coté de sa chaise avant de rapidement
sesquiver. Arkann ouvrit le coffre et fut surpris par la quantité
de missives de toutes sortes. Le visage de Milène ne montrait rien,
mais il
sentait son inquiétude.
« Jai toutes les pétitions?
»
Elle serra les dents. Le ton dArkann
était sans appel. Elle nessaya pas. « Jai brûlé
les pires offres. » Son ton était âpre, son expression
défiante.
« Je vois. Laisse savoir à
celles dont tu as brûlé les missives quelles pourront
me présenter verbalement leur cas si elles nont pas le temps
de produire une copie. Si japprends que lune delle na
pas eu le mot
»
Milène était outrée.
Il sentait son hésitation. Si elle avait été sure
de ses alliées, si elle avait eu un plan viable, elle laurait
renversé sur le champ. Elle hocha brusquement de la tête,
et sen alla pour obéir à ses ordres.
Le harem le regardant, Arkann commença
à filtrer les nombreuses missives. Le foyer était proche,
à sa droite, et il jetait au feu les missives les moins intéressantes
au fur et à mesure quil les regardait, ne passant que peu
de temps sur chaque. Celles qui étaient trop tape-à-lil,
celles qui tentaient de lensorceler il y avait encore quelques
unes qui pensaient que de telles choses pouvaient marcher-, celles qui
utilisaient du mauvais
papier ou encore une mauvaise calligraphie, il les jetait au feu. Cette
première étape en était une délimination.
Il se retrouva avec une vingtaine de
missives, puis une douzaine supplémentaire lorsque Milène
revint avec les pétitions quelle navait pas brûlées
malgré ce quelle avait dit. Il ne mentionna pas le mensonge
et inspecta ces pires offres. Deux dentre elles étaient
bassement
inacceptables. Les dix autres, par contre
le firent sourciller.
Effectivement. Les pires offres. Pires pour le harem.
Le pouvoir dobjection, de filtrage,
était un droit pour lequel tout harem se battait avec conviction.
Un male de lespèce le remettait en cause à ses risques
et périls. Une seule fois avant Arkann lavait remis en cause,
et il avait été renversé. Les deux fois ou Aramis
lavait remis en cause, il avait aussi été renversé.
Il y avait de la rébellion dans
son harem, mais pas de révolte ouverte. Il semblait avoir gagné.
Et quel gain cétait
La tentation était forte dexpulser
huit auxiliaires supplémentaires pour faire place à ces
dix candidates au calibre redoutable, mais il sentait que toute tentative
de dépasser les deux postes causerait sa perte.
Il examina les vingt missives initiales
et trouva parmi elles une autre candidate du même calibre qui avait
été manquée par Milène dans le peu de temps
quelle avait eu.
Onze. Il jeta au feu toutes les autres
pétitions.
Onze. Il savoura chacune delle.
Toutes contenaient des sortilèges, dune manière ou
dune autre afin de démontrer leurs capacités, et plus
de la moitié contenaient des aspects intrigants ou inconnus. Une
seule était dotée dun sortilège pouvant être
qualifié dhostile, mais il ny prit garde car la qualité,
lingéniosité, la subtilité de ce sortilège
valaient bien un
petit envoûtement agréable.
Comme il était coutume, elles
offraient des cadeaux. Lune avait trouvé un métal
quil ne connaissait pas et avait glissé une mince lamelle
de ce métal dans son enveloppe pour lappâter. Plusieurs
énuméraient des connaissances magiques quelles pensaient
quil ne possédait pas et quelles lui offriraient, et
alludant à dautres choses quelles pourraient lui apprendre.
Dans plusieurs des cas, il sagissait de connaissances
nouvelles.
Lune avouait avoir connue trois
autres males un fait extrêmement rare- et nêtre
plus vierge depuis longtemps, mais elle offrait toute de même ses
services et ceux de sa fille, qui elle était toujours pucelle.
Il était rare que les liens mère-fille survivent jusqu'à
lage adulte, et il était
curieux. Elle nénumérait pas les connaissances possédées,
mais elle avait été chef du harem dArastel jusqu'à
ce quil la bannisse, et de celui dArtemis jusqu'à sa
mort.
Une autre aussi nétait
plus vierge. Son offre était intéressante, mais sans plus,
à lexception du fait quelle avait mis Arafel et Ahaken
au monde, des males, et avait survécu, ce qui était fort
rare. Elle ne faisait aucune offre, mais il semblait y avoir une implication
quelle pourrait peut-être se laisser convaincre de la rendre
enceinte de males. Après tout, si elle avait survécu une
fois, peut-être pourrait-elle le faire deux fois. Malgré
la rivalité mortelle que se vouaient les males de lespèce,
être le géniteur dun male conférait une grande
notoriété. Arkann ne comptait plus ses filles depuis longtemps,
mais il avait été le géniteur de quatre fils quil
surveillait étroitement, à la fois pour se protéger
deux, et les protéger contre les autres males qui les voulaient
morts.
Et puis il y avait cette offre toute
spéciale, cette femme qui avait trouvé le moyen de se saisir
du corps dune personne et den faire le sien, pour un temps.
La technique elle-même il désirait ardemment. Elle avait
cette connaissance depuis presque deux siècles, et elle lavait
affiné. Elle était toujours vierge. De corps. Mais en volant
le corps de simples humaines, elle avait été prostituée
de ruelle, courtisane de haut rang. Elle avait appris les techniques les
plus anciennes, les plus secrètes des bordels de Matao, de Kabergil
et de Saffan. Elle avait appris les 113 exercices traditionnels des femmes
de Kalenn et les appliquaient rigoureusement sur son vrai corps. Elle
était maître des danses érotiques de maintes cultures.
Elle se disait sensuelle, mais dénuée de honte. Elle pouvait
jouer la vierge innocente comme la putain la plus dévergondée.
Elle pouvait prendre contrôle de corps desclaves pour son
plaisir, lui donner une vierge à chaque nuit. Elle avait choisi
ce chemin pour lui. Deux siècles à tout apprendre, à
bien se familiariser avec le corps umain,
sachant que seuls des exilés comme Arkann pouvaient tirer plein
profit delle.
« Non. » La voix de Milène
était froide, coupante, sans appel. Avec regret, Arkann mit cette
pétition de coté, sans toutefois la jeter au feu. Il cacherait
cette pétition dans son bureau, sinon elles la trouveraient, et
la détruiraient.
Lune des pétitions provenait
de la « Reine de Marsalis », ce qui expliquait bien des choses.
Marsalis était un petit royaume qui avait toujours tenu tête
à lEmpire et avec qui il avait été plus facile
de faire la paix que de faire la guerre. Le petit royaume avait grandi
en un petit Empire au fil des siècles, bien géré,
toutes les tentatives de subversion contrées par la magicienne
quétait cette reine. Elle offrait lannexion de Marsalis
au Duché de Valan au travers dun mariage détat
avec lui. Loffre le fit
sourire, car celle qui avait fait cela avait travaillé longtemps,
sournoisement, lavait ciblé spécifiquement, et cela
flattait son ego, et son sens de la justice lamenait à vouloir
la récompenser.
« Non. » La voix de Milène
était ferme.
« Fais la venir. »
« Non. Il est hors de question
que quiconque ait un droit légal sur toi, ne fut-ce que par le
droit des humains. »
« Fais la venir. »
« Non. Elle ne serait que simple
auxiliaire, et elle aurait des droits quaucune dentre nous
ne possède? Plutôt mourir. »
« Ligonne a une longue frontière
avec Marsalis. Je veux Marsalis. »
« On va lui régler son
compte au Duc de Ligonne sil tennuie autant, » dit-elle,
dun ton excédé. « Tu pourrais avoir lEmpire
mais tu nen veux pas. Et maintenant tu veux Marsalis? Foutaise!
»
« Je nai jamais perdu de
guerre, sauf celle contre Marsalis. Je veux cette reine hautaine qui ma
forcé à retraiter. Une douce revanche sur une ennemie méritante.
Je veux voir sa robe blanche, tachée de sang à laine,
battant au vent tel un drapeau au plus haut mat de cette forteresse qui
lui sert de palais. Je veux ça, et beaucoup plus. »
« Et tu veux le duo mère-fille,
» elle lui dit, dune voix tendue et lourde.
Il sourit. « Oui. »
« Trois, au lieu des deux auquel
tu as droit. »
« On dit _un_ duo. Jaccepte
_deux_ pétitions, pas trois. » Il était amusé.
« Ça, ou encore cette douce créature
»
une caresse sur la première pétition rejetée par
Milène.
« Toi, tu cherches le trouble.
Tu vas lavoir. »
Il était au bord. Elle hésitait.
« Viens plus proche, » il lui murmura, et elle sapprocha.
« Ta ceinture de chasteté
tombe demain soir. Les trois prochains jours sont à toi, complètement.
Tu seras ma favorite pour les mois qui viennent. » Des mots chuchotés
à son oreille.
« Salaud! » elle lui grogna,
à loreille, la main quelle avait placé sur son
épaule le serrant douloureusement. Elle lui en voulait terriblement.
« Lannée entière comme ta favorite, ou rien.
»
« Marché conclu. »
Il pouvait sentir le frisson de ressentiment passer au travers du harem.
Elles savaient que celle qui était leur chef venait de les trahir.
Plus que jamais, il venait de la séparer des autres. Et divertir
sur elle une partie de leur rancoeur. De nombreux bons coups,
aujourdhui.
Et puis vint le moment de la première
audience. Astarté, Reine de Marsalis, fit son entrée. Il
se leva, et se courba devant elle, tel le Duc quil était,
face à la Reine quelle était. Elle en fut amusée.
En apparence, elle avait dans la mi-trentaine, des cheveux dun blanc
pur souvent associé
aux mages, peu importe leur age. Mince et élancée. Elle
avait quelques rides quil associait avec ces personnes qui souriaient
ou riaient beaucoup. Cela ne lui déplaisait pas, surtout que la
plupart des femmes de son harem poursuivaient leur conception personnelle
de ce quétait une belle humaine.
« Arkann. Il y a longtemps que
je tai vu. »
La Reine de glace. La Pucelle de Marsalis.
La Reine éternelle. Elle sétait déplacée
instantanément au travers du monde des Ombres jusquici, à
des milliers de lieues de distance. Indépendante ou en tant quAuxiliaire,
elle pouvait faire ce que lui et son harem ne pouvaient faire selon les
termes dexil dArkann.
« La dernière fois, dans
des circonstances désagréables, O ma Reine. » Il lui
répondit, la regardant de près pour la première fois
de sa vie, posant son regard sur ses vraies formes. Elle était
belle, confiante, portant le regard hostile du harem sans montrer quelque
malaise que ce soit. La compagnie des humains, dun Empire puissant
comme voisin avaient façonné son caractère.
« De ton point de vue, oui. »
Elle portait plastron et cotte de maille, son casque tenu sous son bras
gauche. Un long sabre était suspendu à son baudrier. «
Me permets-tu de garder mon sabre pour quelques jours? Je te le donnerais
maintenant en gage de ma reddition, mais des compagnies complètes
de mercenaires traversent ma frontière avec Ligonne.
Rien que je ne puisse contrôler, mais disons que je vais hanter
le sommeil de mon voisin pour les mois qui viennent. » Elle disait
cela dun ton léger, mais il sentait une certaine hargne en
elle.
Il sourit. « Je crois que cest
faisable. As-tu des questions, des clarifications à apporter? »
Elle secoua la tête. «
Non. Les termes sont clairs. Je crois avoir gagné ton respect en
diplomatie et sur le champ de bataille, et cela me suffit. Moi, ma virginité,
et Marsalis tappartiennent. »
« Bien. Tu portes armure. »
« Mes éclaireurs sont
en contact avec lennemi. »
« Je vois. » Il pensa quelques
moments, puis sourit. « Le Duc de Valan viendra porter assistance
à sa fiancée. Milène, fais parvenir au Maréchal
Ney ses ordres. Je veux mes régiments de cavalerie paré
à chevaucher pour
Marsalis au plus tard dans deux jours. »
« Deux jours. Cest court,
» lui répondit Milène, « il y a toute la logistique.
Nous devrons passer par Ligonne et Valmorin. »
Elle disait cela, alors quAstarté
lui caressait lesprit. Une image dun champ de bataille, lennemi
en déroute, la cavalerie en poursuite. Astarté, dos contre
le flanc dAramis, soutenue par Arkann, lui qui la déflorait
la,
sur le champ de bataille
Une image claire, forte, étrangement
puissante.
« La diplomatie je men
charge, » il grogna. Ce couard de Duc de Valmorin resterait neutre,
et Ligonne il étriperait lui-même sil se mettait au
travers de son chemin.
« Va, Astarté. Laisse
nous en un peu. »
Elle sourit, mis son casque en place,
et sen alla.
Il avait une puissante érection.
Il y avait trop longtemps quil navait pas guerroyé.
Un certain vent dexcitation courait au travers du harem. La plupart
y seraient, bien sur. Il tenta de cacher son état, mais elles le
connaissaient trop bien, et il eu à endurer quelques railleries.
Une excellent journée, puisque le harem reprenait de son humeur.
Aller en guerre, était-ce un bon moyen pour détourner lattention?
Apparemment
Et puis ce fut le temps pour le duo
mère-fille, et une partie du froid revint lorsque ces deux la firent
leur apparition. La mère entra avec un air de suprême confiance
envers le harem, sans toutefois empiéter sur
lautorité dArkann. Tout était dans la démarche,
le regard. Il sentait avec quelle intensité Milène lhaïssait
déjà, capable en un coup dil didentifier
une dangereuse rivale.
Sa fille avait été bien
instruite, mais elle était nerveuse, et ne pouvait écarter
les yeux dArkann. Elle le regardait sous sa vraie forme, et il pouvait
sentir ce désir qui lui brûlait les cuisses. Une pouliche.
Jeune, un peu moins dun siècle, ce qui faisait dArtemis
son géniteur.
« Bienvenue en mon domaine, Aurélie
et Aurore, » Arkann dit, chaleureusement, en se levant et avançant
vers elles.
« Et nos remerciements pour cette
audience. Je dois avouer que je doutais pouvoir enfin obtenir une chance
de voir ma pétition considérée. Jai appris
à mattendre à ce quelle ne soit jamais vue par le
principal intéressé. » Sa forme humaine était
belle, alors que sa vraie forme était
plutôt moyenne. Elle avait une belle voix.
« Oui. Jimagine, quayant
été chef de deux harems, tu as appliqué des tactiques
similaires envers tes maîtres dalors. »
Elle ria, « bien sur. Te retrouverais-tu
dans notre situation que tu ferais de même. » Puis, dun
ton plus sobre, « jai une vaste expérience de gestion,
à la hauteur des attentes dun male de ton expérience.
»
« De mon age, tu veux dire, »
il dit, en souriant.
« De ton expérience. Taccuser
dêtre vieux reviendrait à dire que je suis vieille
moi aussi, puisque nous sommes de la même époque. Je me considère
jeune, encore, et jai beaucoup à apprendre de toi. Je peux
tapporter une
loyauté inébranlable, lexpérience variée
acquise dans trois harems différents. Je suis une gestionnaire
méticuleuse, janticipe les besoins de mon maître. Et
puis il y a Aurore, qui est mon apprentie, avec qui je partage tout. Elle
saura massister, puis prendre ma relève. Elle est très
douée. »
« Vraiment? »
Aurélie neu pas le temps
de répondre, car Milène la coupa. « Tu me sembles
bien présomptueuse, bien arrogante. Cest cette arrogance
qui ta fait bannir du harem dArastel? Ou bien est-ce ta supposée
loyauté
inébranlable? »
Aurélie rencontra les yeux de
Milène, « oui, et je navais pas encore appris les vertus
de la loyauté, à lépoque. Tu devrais essayer,
ma petite. Les males sont seuls, entourés de celles qui veulent
leur mettre un collier autour du cou. Il y a beaucoup de pouvoir à
obtenir, si tu te démontres
être une alliée à toute épreuve, si tu te coupes
délibérément des autres, si tu fais ton lit avec
celui qui est la source de ton épanouissement. Oui, sil tombe,
tu tombes avec lui, pour être tourmentée par ces consoeurs
à qui tu as tourné le dos, mais le jeu en vaut la chandelle,
et les humiliations de tes consoeurs, aussi terribles soient-elles, ne
sont que passagères, et ton maître saura te récompenser.
»
Arkann nouvrit point la bouche,
laissant les deux croiser le fer. Un instinct lui disait cependant que
les motifs dAurélie
étaient douteux, que celle-ci
jouait un jeu qui serait bientôt révélé, ce
qui le rendait inquiet. La réplique de Milène à Aurélie
fut dévastatrice. Se voulait dévastatrice. « Arkann,
elle était le chef du harem dArtémis, en charge de
sa sécurité. Artémis est mort. Elle parle bien, mais
elle est incompétente. »
Un coup la ou ça faisait mal,
sur une plaie encore ouverte. La douleur se lisait sur le visage dAurélie.
« Artémis a été mon étalon, mon partenaire
pour plus longtemps que tu as vécu. Je lai aimé comme
tu nas pas encore aimé. Il était beau, sournois, un
peu cruel, et fougueux comme deux. Je lui ai donnée cinq filles.
Lorsquil est mort, jai été terrassée.
Mon deuil a duré trente ans. Je me blâmais. Nous nous blâmions
toutes. Jai tourné la page. » Il y avait de lémotion
dans la voix dAurélie, une tristesse profonde qui donna de
légers remords passagers à Arkann.
« Pour ce qui est lincompétence
dont tu parles
nous navons pas baissé notre garde.
Aurions-nous pu faire mieux? Oui. Et toi? Toi et ton harem, auriez-vous
pu faire mieux? »
« Que veux-tu dire? » demanda
Milène, soudainement prudente.
Aurélie rencontra les yeux dArkann
du regard, puis rencontra ceux de Milène. « Ton Maître
est cinq fois meurtrier. Ton Maître a tué le mien. Il ta
déjouée, comme il a déjoué ton harem quatre
autres fois, comme il a
déjoué mon harem, et quatre autres harems dans sa vie. »
Lexpression de Milène
était catastrophée.
Arkann parla rapidement. « Tu
me flattes, Aurélie, mais je nai pas tué Artémis,
et je nai tué personne. Je le jure. »
Le silence de plomb fut rompu par Aurore
qui parla pour la première fois. « Quand un male jure, cest
quil ment. » Un vieux dicton.
Il sentait lhumeur du harem changer,
une mauvaise sensation courant dans son dos. « Des mots. Des accusations
ne pouvant être prouvées, car elles sont fausses. Est-ce
ainsi que tu comptes obtenir de moi que je
taccepte? »
« Ton harem va timposer
ma présence. » Puis, adressant le harem, « jinvoque
votre protection, pour un temps, le temps de vous montrer à toutes
comment il sy est pris. Vingt ans jai pris pour retracer les
pas de chacun de ses meurtres. Rusé, subtile, patient, tel est
votre Maître. »
Il tenta bien de lempêcher,
mais le harem se tourna contre lui, de manière douce, mais ferme.
Contre la volonté unie du harem, il ne pouvait rien faire, barré
sur place, incapable de même bouger.
Et il dû endurer, une heure de
temps, incapable de savoir ce qui se disait, incapable de plaider pour
sa défense, de réfuter les arguments. Il avait des sueurs
froides. Que savait Aurélie? De par sa confiance, elle en savait
beaucoup trop.
Et puis il sentit comment Aurélie
avait finalement terminé. Milène était livide et
vint à lui avec un pas rageur. Elle lui asséna une gifle
si puissante que, incapable de bouger, il tomba de coté, son épaule
cognant
durement le sol. Milène se saisit de lui, le tirant par sa tunique,
se préparant à le gifler de nouveau, arrêtée
par la voix dAurélie.
« Ça ne sert à
rien. Tu narriveras quà le rendre mauvais. Il est du
domaine des males de sentretuer. Il est de notre domaine de les
en empêcher. Mon Artémis que jaimais tant complotait
sans cesse, lui aussi. Eut-il la chance de sen prendre à
ton Arkann quil laurait fait sans hésiter. Non, les
battre nest pas la manière. Nous ne pouvons non plus les
garder prisonnier; au mieux ils cassent notre unité ou séchappent,
au pire ceux qui perdent espoir de regagner leur liberté après
de longs siècles de captivité finissent par perdre le désir
de vivre, et il ny a rien de
plus triste. »
Milène tremblait de fureur,
de désir de violenter Arkann pour ses crimes. En cela, elle était
limage même du harem, qui désirait la même chose.
« Que proposes-tu? »
« Un état de semi-captivité.
Une liberté dêtre ce quil a toujours été,
mais une surveillance continue, sans faille. Une unité totale du
harem sur ce seul point, une unité pour lempêcher de
commettre dautres meurtres. Une unité qui ne permet pas labus,
une unité quil ne craindra que pour les effets sur ses plans
maléfiques. Une unité qui lui permet de continuer à
bannir, à abuser de son autorité. Une unité qui vous
permet dagir comme vous lavez toujours fait, qui vous permet
de le renverser pour un temps. »
« Le meurtre est un point sur
lequel toutes sentendent. Peut-être le seul point. »
« Jai étudié
votre harem de longues années. À Milène joffre
le rôle que je tenais avec Artémis, car je la crois capable
de le tenir. Je partagerai mon expérience. Au harem, joffre
mon expertise pour contrer votre Maître.
Jaimerais jouer le rôle darbitre neutre qui ne prend
ni pour un bord, ni pour lautre. Je veux être membre de votre
harem, davoir sur lui les mêmes droits que vous, sans mallier
à aucune, sans faire une ennemie daucune. »
« Je veux partager mon expertise
avec dautres harems, particulièrement ceux des males les
plus dangereux. Arkann est celui qui a tué le plus, mais Aramis
est juste derrière, et Arkel, fils dArkann, suit dans les
traces de
son père. Jai perdu énormément avec la mort
dArtémis. Je veux réduire ce massacre insensé.
Il y a un point déquilibre ou un male peut être contrôlé
sans être brimé, et je sais ou il se trouve. Je ne vous cacherai
pas que
mon impartialité à un prix. Des harems que je visite, je
demande laccès au male. Cest mon paiement, juste et
équitable. »
« Que dis-tu, harem? »
Milène relâcha Arkann,
le laissant retomber durement sur le marbre. « Je dis que tu as
une belle arnaque. » Il y avait de la jalousie dans sa voix, toujours
mélangé avec la fureur envers Arkann, mais il y avait aussi
une
bonne pointe dappréciation.
Aurélie lui offrit un sourire.
« Oui, cest plutôt bien, mais tout le monde y gagne,
même le male, ne serait-ce que parce que ses chances dêtre
assassiné seront moindres, que sa liberté sera préservée
malgré lunité. Aurore sera mes yeux et mes oreilles
pour votre harem. Elle ne sera pas impartiale, mais elle me donnera la
vérité, sous peine dexclusion de votre harem. De notre
harem. » Il y avait une note interrogative sur les deux derniers
mots.
Milène consulta les autres,
puis confirma. « De notre harem. »
**
La situation dArkann était
très précaire, et il le savait. Paradoxalement, celle contre
qui il en avait était celle contre qui il ne pouvait rien, ce qui
rendait sa colère pour le moins frustrante. Son contrôle
sur le harem était chancelant, et le demeurerait pour longtemps
: les femmes du harem étaient en guerre, courroucées, bouleversées
de ne pas lavoir stoppé. Toutes voulaient le châtier,
mais Aurélie les avait convaincues de prendre
un autre chemin, de négocier.
Ce quelles appelaient une négociation,
il appelait un ultimatum. Il navait eu dautre choix que de
plier.
Il était maintenant épié
en tout temps lorsquil nétait pas en compagnie de lune
delles. Son laboratoire privé était maintenant ouvert
de la même manière que sa forge et il devait être accompagné
par des apprenties en tout temps lorsquil utilisait son laboratoire.
La seule exception était son bureau, qui demeurait fermé
à toutes, impénétrable. Il avait juré de tout
détruire, de réduire en cendres les milliers de tomes irremplaçables
qui sy trouvaient. Sa librairie personnelle. Elles avaient été
horrifiées par cette menace, car il partageait parfois certains
de ces livres avec elles, et elles savaient combien cette librairie était
unique, la convoitait. Elles savaient combien elle était chère
à Arkann, et quils les maudiraient jusquà la
fin de ses jours pour lavoir poussé à une telle extrémité.
Il avait juré de ne jamais utiliser son bureau pour tendre des
pièges, mettre en mouvement ses plans contre dautres males,
ou encore communiquer avec des assassins. Elles lavaient forcé
à verser son sang comme gage de sa parole, et avaient utilisé
ce sang pour créer un sortilège quil avait accepté
de ne pas résister. Sil manquait à sa parole, il souffrirait
dintenses douleurs dont seul le harem pourrait le libérer.
Scellé par son sang, accepté sans résister, il doutait
pouvoir jamais se débarrasser de ce boulet.
Comme si ce nétait pas
assez, elles lavaient forcé à révéler
les pièges et plans couramment actifs, encore une fois au travers
de son sang. Il avait bien tenté de taire ses meilleurs plans,
mais son sang, versé sciemment et de son propre gré avait
été sa perte. Elles avaient même poussé laudace
jusquà le forcer à révéler comment il
sy était pris pour ses assassinats, et sil en avait
commis dautres quAurélie ne connaissait pas. Il avait
été obligé dadmettre deux autres cas, et même
Aurélie avait été sidérée.
Il avait causé la mort de sept
males, la plupart redoutables, et loutrage navait fait que
grandir, mais aussi le respect, le désir de porter sa progéniture,
ainsi que la fierté dêtre de son harem : leur espèce
était ainsi faite quelles feraient tout pour le stopper,
mais un male aussi dangereux était irrésistible, doté
des qualités quelles désiraient toutes pour leurs
enfants.
Le chat était hors du sac. Dans
peu de temps, toutes parmi leur espèce sauraient ce quil
avait fait. Le harem serait abreuvé dinjures pour son impuissance
passée, pour la perte de tant de males qui auraient pu leur fournir
une place dans un harem sils avaient vécu, mais cela ne durerait
que quelques années, et le prestige de faire partie du harem dun
male aussi retors était énorme, dépassant même
celui de faire partie du harem dAramis.
Il avait beaucoup perdu, elles avaient
beaucoup gagné, mais elles ne le voyaient pas ainsi. Il trouvait
injuste de devoir être si précautionneux après tout
ce quil avait concédé. Son humeur était massacrante.
Le harem
laccusait de bouder, mais il ne faisait que panser ses plaies. Toutes
les nuits depuis sa cuisante défaite, il les avait passées
sans lune de ces vipères. Il ne pourrait longtemps continuer
ainsi sans répercussions néfastes, mais elles aussi devaient
faire attention, et si elles le
renversaient maintenant, elles sassureraient dune profonde
rancur de sa part, et elles étaient conscientes quune
solution quil pouvait voir à sa situation était de
rebâtir le harem au complet.
Ou bien de séchapper,
repartir à neuf. Une solution radicale, mais quil considérait
maintenant. Le plus difficile serait de sauver ses plus précieuses
possessions dans sa fuite, un problème quil avait partiellement
résolu dans le passé en prévision dune situation
comme celle quil vivait. Non. Il nétait pas temps pour
le harem de pousser plus loin.
Il donna un violent coup de pied dans
le coffre de campagne, incapable de sempêcher de montrer sa
frustration même sil se savait espionné. Même
les
cauchemars terribles quil avait donné au Duc de Ligonne pour
se nourrir et le punir navaient pas fait baisser sa frustration.
Puis il entendit le cognement donné
par la sentinelle sur un poteau. « Oui? »
La sentinelle entra, un soldat dun
certain age au visage buriné par la guerre et les intempéries,
« le commandant de la garnison de Ref pour vous voir, votre grâce.
»
« Bon, faites le entrer. »
Quelques instants après, un
officier portant les couleurs de Ligonne entra dans la tente, lair
mal à laise. Beaucoup de rumeurs couraient sur la nature
dArkann, la plupart fausses, mais il ny en avait pas beaucoup
de
bénignes. Il se présenta de manière courtoise, et
en vint rapidement aux faits.
« Votre grâce, vous nêtes
pas sans savoir que vous traversez présentement le territoire du
Duc de Ligonne, et je nai obtenu aucune information à cet
effet
»
« Cest compréhensible,
Commandant, » Arkann commença, avec un sourire.
« Je nai aucune autorisation.
Jai envoyé un messager pour aviser le Duc, mais il na
probablement pas encore eu le temps de vous faire parvenir son autorisation.
»
Lofficier hocha de la tête.
« Je suis certain que cette autorisation parviendra dans les jours
qui viennent, et je suis certain que vous naurez pas dobjection
à accepter mon hospitalité pendant que nous attendons. »
« Au contraire. Le temps presse,
» Arkann dit, dun ton triste. « La Reine de Marsalis,
ma fiancée, est durement pressée par des cohortes de mercenaires
et de bandits. Je vole à son secours, et mes escadrons de cavalerie
doivent passer sans attendre. Demain, nous franchirons le col de
Ref. »
Le commandant se retrouvait dans une
position fort fâcheuse, et Arkann prenait plaisir. Ce nétait
pas sportif de sen prendre à un officier coincé entre
devoir et obligation, mais il était dhumeur massacrante.
Lofficier temporisa. « Je navais pas entendu parler
de vos fiançailles, votre Grâce. Veuillez accepter mes plus
sincères félicitations. »
« Merci, commandant. Vous comprenez
donc pourquoi je dois rejoindre ma tendre fiancée au plus vite.
» Il était probablement le premier en plusieurs siècles
à associer tendre avec la Reine de glace.
« Je comprends, et soyez assuré
que ma garnison vous assistera au meilleur de nos ressources, mais jai
bien peur quune avalanche tardive nait bloqué le col.
Jai des hommes en train douvrir un chemin, et la voie sera
de
nouveau praticable dans quelques jours. En attendant, me feriez-vous lhonneur
daccepter de loger dans mes quartiers? »
Arkann se devait dadmettre que
lofficier faisait aussi bien quil le pouvait avec les cartes
quil avait. Malheureusement pour lui, Arkann savait très
bien que le col était parfaitement praticable.
« Je vous remercie de votre offre,
qui est fort appréciée, mais en campagne, je reste toujours
avec mes hommes. Dailleurs, je vais être avec eux lorsque
nous irons assister vos hommes à dégager le col. Je suis
certain quautant dhommes et de chevaux seront dune grande
aide.» Les auxiliaires ne rapportaient aucune accumulation de neige
pouvant être tournée en avalanche par des mains malveillantes.
Demain, il passerait le col.
Lofficier hésita un moment,
puis saccrocha à lespoir quun messager arriverait
pendant la nuit. Il pouvait toujours interdire le passage à laube.
Après quelques mots de plus, il sen alla, pour laisser place
à Milène qui entra dans la tente.
« Quel messager? »
« Celui que je nai pas
envoyé, » répondit-il, sèchement. « Ligonne
peut aller se faire voir. »
Cette réponse ne la surprenait
pas. « Notre train de ravitaillement est lent et vulnérable.
La distance à parcourir est longue. Les hommes de Ligonne trouveront
des raisons pour expliquer pourquoi personne ne peut rien
vendre à ton armée. Des bandits attaqueront
tes unités de ravitaillement. Un peu de diplomatie arrangerait
beaucoup. »
Le sourire dArkann était
mauvais. « Si Ligonne veut en découdre, je serai heureux
de lui procurer ce plaisir. Pour ce qui est des ravitaillements, ils viendront
de Marsalis, mais déplace quelques auxiliaires pour couvrir mes
convois. Elles ne doivent pas intervenir sauf pour aviser les convois.
Nous allons voir ce qui se passera avec la forteresse de Ref, demain.
Sils ferment les portes, ça sera problématique. Il
faudra altérer le commandant. » Il navait aucun engin
de siège. La magie pouvait être utilisée, mais la
manière simple et sans fracas était daltérer
la réalité des officiers clefs.
Elle sourit. « Jai mieux.
De faux papiers, un faux messager, une caresse à lesprit
du commandant pour enlever ses doutes. Tout simple, et rien qui néveillera
les soupçons de quiconque. Une ruse de guerre, rien de plus. »
Arkann grommela il était
dhumeur massacrante et espérait presque un combat- mais acquiesça.
Puis, voyant que Milène ne partait pas, « autre chose? »
« Ma ceinture. Tu nas pas
rempli tes promesses. »
Son regard était dur. «
Vous mavez imposé un choix qui nétait pas le
mien. Ma promesse dépendait de mon libre choix, ce que nai
pas eu. Tu dois maintenant vivre avec les conséquences. »
Il aurait ajouté plus, et plus cinglant, mais une mesure de prudence
le retint.
Lexpression de Milène
sassombrit. « Ta parole ne vaut pas grand-chose, je vois,
» elle dit, dun ton froid comme une nuit dhiver.
Il la regarda droit dans les yeux.
« Tu sais très bien que ce nest pas le cas, et tu naurais
pas attendu tout ce temps pour me parler si tu pensais être dans
ton droit. Si tu veux prétendre, je te donnerai des raisons de
le faire, mais sache que je ne suis pas dhumeur à être
contrarié sur ce
point. »
Elle serra les dents. Il lattendait,
il espérait quelle lui fasse des menaces, mais elle était
trop intelligente et sentait la hargne en lui. Sa réaction fut
surprenante, quoiquà la hauteur de celle qui avait la responsabilité
du harem. La tension la quitta, et elle lui donna un sourire
fatigué. « Pas facile. Est-ce quon essaie de voir comment
on peut revenir à la normale? »
Plus jeune, il aurait répondu
de manière aigre ou arrogante. Elle avait fait le premier pas.
Sil refusait loffre, cest lui qui aurait à faire
le premier pas, plus tard, quand il lui en coûterait plus de le
faire.
Il fit un geste vers la table démontable.
Des coffres de chaque bord servaient de chaise. Ils sassirent, et
elle rassembla ses idées quelques instants.
« Je te connais. Tu te prépares
pour le pire. Je ne te cacherai pas que la pression pour que nous te renversions
est grande. Jy résiste. Moi et Aurélie travaillons
le harem avec laide de Circé. Te renverser est un art qui
a ses règles, un jeu qui doit se faire dans une humeur correcte
et délibérée. Si nous te renversons maintenant, le
harem voudra te punir pour tes crimes. Si nous te punissons, nous cultiverons
en toi une aigreur qui détruira le harem la journée ou tu
reprendras tes droits. » Elle parlait
franchement, et cétait lune des raisons pourquoi elle
était en charge.
« De par ton attitude, tu provoques.
Tu cherches la bataille. Tu compliques ma tâche. De notre coté,
nous tavons asséné un coup comme tu nen as jamais
eu et nous comprenons ta rogne. Cétait nécessaire,
tu nauras jamais dexcuse, mais moi aussi je pense souvent
au probable et au pire. » Elle le regardait dans les yeux, ne cherchait
pas à cacher ses états dâme. « Il y a
longtemps, jai été brièvement auxiliaire. Puis
jai été éjectée. Jai erré,
jai traversé mon désert, des siècles durant.
Le reste tu connais. Je ne veux pas retourner dans le désert. Les
autres oublient, cest facile, et personne ne veut y penser. »
Il y eu un moment de pause, puis, «
je crois que tu as tort dêtre fâché pour les
choses que tu nous as obligé à te faire. Tu crois que nous
avons tort de continuer à être en colère. Que dirais-tu
de déclarer que nous avons tout deux raison, ou tout deux tort?
Fouette Sia, soit cruel avec elle si cela te fait du bien. Elle aimera.
Déflore Maya, soit brutal sans réserve, prends ton plaisir
sans penser au sien. Elle ten voudra, elle cherchera à se
venger, mais cest ton droit. Si tu veux, je lavertirai même,
pour quelle cherche à te fuir, à te résister.
Peut-être veux-tu que nous fassions un détour pour visiter
le Duc de Ligonne? Si une guerre denvergure taiderait
lEmpereur est ton pantin, et lEmpire à des voisins
à conquérir. Jaurai besoin de ton aide, mais à
nous deux, nous pouvons régler tout cela à lamiable.
»
Elle avait terminé. Il prit
son temps, versant du porto dans deux verres détain avant
dy goûter. Ils burent en silence pour de longues minutes.
« Peut-être. »
Elle sourit, chaleureusement. «
Oui, en dautres termes. »
Il laissa échapper un grognement.
Accepter la paix était parfois difficile.
« Pour ce qui est de mon prix,
maintenant, » dit-elle, avec confiance.
« Ton prix? »
« Bien sur. Tu ne penses tout
de même pas que je vais prendre ton bord sans une juste rémunération?
Je ne me rendrai pas populaire. Je vais devoir être stricte. »
« Dis toujours, » il lui
dit, dune voix sèche. Il nétait pas surpris.
Elle le jaugea du regard quelques instants,
puis se leva et vint sasseoir sur ses cuisses, mettant ses bras
autour du cou dArkann. « Est-ce que tu maimes? »
Son premier réflexe était
de tourner les yeux et de grogner. Il détestait quand lune
delles faisait cela. Lamour parmi leur espèce était
une chose possessive, jalouse, féroce et étouffante. Milène
nétait pas du genre à
poser ce genre de question, et il ne suivit pas son réflexe, la
considérant du regard.
« Toi, tu as quelque chose en
tête. »
« Oui. Réponds. »
Il tentait de deviner, tout en formulant
sa réponse. « Je testime beaucoup. Belle, intelligente,
fière. Tu es fourbe et sournoise quand cela te sert bien, mais
tu choisis tes moments avec sagesse. Tu es celle de mon harem que je crains
le plus. Tu es toujours avec moi malgré avoir mené deux
renversements, ce qui devrait répondre à ta question. Et
moi? Maimes-tu? » Ce jeu pouvait ce jouer à deux.
Elle ria. « Quelle question.
Bien sur, puisquil ny a que toi que je puisse aimer, et cela
vaut pour les autres, excepté Aurélie qui a vraiment joué
un coup de maître. » Il y avait de lenvie dans sa voix.
« Tu me dis fourbe et sournoise, et tu me flattes, mais ce nest
rien comparé à toi. Tu es sept fois meurtrier; cela me désole
et me rend furieuse quand je pense à ces pauvres males, mais il
demeure que tu es le pire male depuis Aaren et cest une chose irrésistible
pour nous. Le harem brûle de fureur, mais aussi dun désir
renouvelé et multiplié de porter tes enfants, et cest
lune des raisons pourquoi le harem est si difficile à contrôler
alors que tu nous boudes. »
Elle eut un moment de pause, caressant
le cou dArkann alors que celui-ci lenserrait dans ses bras
et la tirait contre lui. Elle pouvait sentir sa chaleur. Elle continua,
lui mordillant loreille par moments, « tu es généreux
avec tes enseignements, le partage de tes connaissances, lépanouissement
de nos talents même si tu peux faire mieux. Tu nes pas déraisonnable
comme la plupart, tu nes pas imbu de toi-même comme la majorité.
Tu nous crains, sans nous craindre. Tu ne vois pas être renversé
comme une atteinte à ta masculinité, comme une insulte mortelle,
comme une honte. Tu est confiant. La manière avec laquelle tu traites
tes auxiliaires dit beaucoup : tu ne leur dois absolument rien, mais tu
vas parfois parmi elles, pour les aider à grandir, leur montrer
comment maîtriser leurs pouvoirs. Je déteste quand tu passes
du temps avec elles, car ce temps nest pas passé avec nous,
mais je me rappelle les décennies passées comme auxiliaire.
Je me rappelle ces deux fois ou tu as daigné me consacrer une nuit,
le plaisir que tu mas donnée par tes caresses, avec ta bouche.
Tu maurais demandé de me laisser pénétrer,
de te laisser me déflorer que jaurais accepté, sans
désirer rien de plus. »
Elle le caressa de son nez, savourant
pendant de longs instants la manière avec laquelle il utilisait
ses mains, comme lors de cette première nuit, il y avait longtemps,
comme sil redécouvrait son corps malgré les vêtements
quelle portait.
Elle lembrassa de manière
presque tendre, et Arkann répondait comme elle avait espéré,
lui faisant suffisamment confiance même sil ne savait toujours
pas son but ultime, nassumait pas que ceci nétait quune
vulgaire tentative de se débarrasser de sa ceinture. Ce serait
un résultat, mais pas le but.
Elle savoura le moment, la curiosité
qui se lisait sur le visage dArkann, ses doigts qui sétaient
glissés sous sa tunique et qui lui caressaient maintenant le creux
du dos. Un dernier examen de conscience, de ses vrais désirs, du
risque terrible quelle allait prendre. Rien navait changé.
Des jours durant elle y avait pensé, avait soupesé son choix.
Elle se commit. « Arkann. Tu
ne peux le savoir avec ce corps dhumain que je porte, mais je suis
en chaleur. » Fermement, sans dévier de sa trajectoire, le
fixant des yeux. « Rends moi enceinte. Ce seront des jumeaux. Ils
seront males. »
Voila, cétait fait. Joie,
tristesse, désir, incrédulité. Ces choses pouvaient
se lire sur le visage dArkann. Une joie à une offre qui nétait
pratiquement jamais faite. Tristesse, car il était très
rare quune femme ne survive à lallaitement de deux
bouches se nourrissant de son lait
maternel et de son sang. Seule la femme décidait si elle aurait
des males, et elle le faisait en sachant le risque mortel quelle
courait.
« Milène
»
la voix dArkann était rauque, étreinte démotion,
et elle était touchée, car elle sentait quArkann allait
résister. Elle mit un doigt sur ses lèvres. « Il ny
a quune raison pour me refuser : si tu penses que je ne suis pas
digne. » Par tradition, un male ne saccouplait ainsi quavec
les plus fortes, celles qui donneraient des males capables de se défendre,
de prendre harem et de le contrôler.Elle
sourit lorsquelle mit la main sur le devant des pantalons dArkann
et sentit lérection forte et fière quil arborait.
Elle se leva. « Viens
»
Il la suivit, comme prit dans une transe.
Elle était plus calme que lui, plus posée, ayant eu le temps
de se faire à lidée. Il frémissait dimpatience,
linstinct le prenant complètement. Elle lamena au centre
de la tente, poussant un coffre se trouvant dans le chemin, et se dénuda
rapidement, puis laida avec ses vêtements. Arkann laissa passer
un vil juron en voyant la ceinture quelle haïssait tant, et
quil lui fallait maintenant enlever.
Elle avait peur. Elle savait quil
serait difficile de demander à Arkann de reculer, mais il trouverait
le moyen si elle le lui demandait. Elle avait peur
mais elle désirait
cela, pariait sa vie quelle serait lune des rares
suffisamment forte pour survivre. Elle voulait ceci. Elle mettrait au
monde deux précieux males. Prestige et influence seraient siens.
Et puis il y aurait la manière attentionnée avec laquelle
Arkann la traiterait dans les mois à venir, la connaissance et
le pouvoir quil allait lui confier. Et cétait sans
compter quelle lattacherait à elle pour ce cadeau inestimable.
Si elle survivait.
Et puis un autre pas était franchi
: sa ceinture glissa, la libérant. Elle poussa Arkann pour lempêcher
de la saisir de vitesse. Tel un puceau lors de sa première nuit,
il oubliait des détails. Le godemiché de métal se
trouvait toujours profondément en elle, et elle le retira lentement,
sous ses yeux impatients, avides. Le métal luisait; surexcitée,
elle avait réussi à se donner plusieurs orgasmes avant de
venir, et le moment était maintenant venu. Elle sentait la présence
du harem, qui savait maintenant ce qui se tramait et voulait être
témoin de cet acte rare.
« Ta forme, Arkann. Prends ta
forme
le harem te cachera. »
Il était impatient, frémissant
denvie, mais elle avait tout le levier du monde, et il sexécuta
sur le champ. Jamais le harem ne trahirait cette violation des termes
de son exil.
Le passage ne prit que quelques secondes
et debout devant elle était maintenant Arkann dans toute sa gloire
: noir comme la suie, la ou les flammes ne le mordaient pas. Une fumée
noire et dense séchappait de ses naseaux chaque fois quil
respirait. Il était grand, une carrure massive, des bras puissants.
Une crinière de feu, une queue enflammée, et de gros sabots
embrasés, menaçant de tout mettre en feu. Un humain aurait
été terrifié par lapparition presque démoniaque.
Énorme, deux jambes, deux bras, des traits équins qui étaient
dun fin presque brutal. Cétait la première fois
quelle le voyait ainsi, en chair et en os.
Dune pensée, elle chargea
le harem de cacher les sons, les lueurs, et la fumée. Elle le chargea
aussi de contrer le feu qui se répandait. Puis elle protégea
son frêle corps dhumaine contre la chaleur de fournaise séchappant
de lui. Elle était excitée, prête, mais elle voulait
voir cet
étalon quelle navait jamais vraiment vu. Il prit les
épaules de Milène dans ses mains, son impatience manifeste,
et tenta de la pousser sur le lit mais elle sesquiva, riant de manière
espiègle.
« À mon pas, Arkann, ou
pas du tout. »
Des colonnes de fumée séchappèrent
de ses naseaux, et il montra les dents, les longues canines qui lui permettaient
de boire le sang de ses proies. Les flammes lichaient son corps de manière
intense, reflétaient son ardeur. Mais il se tint tranquille. Elle
linspecta sous toutes ses coutures, lui leva même la queue
pour voir et soupeser ses pesantes couilles, ce qui le fit piaffer dindignation
et presque se retourner, mais cest elle qui avait le contrôle,
et il se garda bien dagir.
« Je te trouve bien téméraire,
» il lui dit dune voix profonde et grave qui la fit frémir
de désir. Son expression était intense, rivée sur
elle.
Elle jouait avec lui, le tourmentait,
le traitait presque comme un objet, et lorsquil ne coopérait
pas, elle séloignait de lui, le faisant attendre jusqu'à
ce quil capitule. Elle sentait la puissance dArkann, prête
à se
déchaîner. Il pensait quelle prendrait sa vraie forme,
mais il se trompait. Il allait devoir se contrôler.
Et puis la pièce de résistance,
quelle avait gardé pour la fin. Elle prit ce godemiché
quelle avait porté en elle si longtemps. Elle compara lobjet
avec le membre tressaillant dArkann. Chaque nervure, chaque détail
était
rigoureusement exact. Lobjet était plus petit. Pouvait-elle
laccommoder? Elle nen était pas sure. Il fallait essayer.
Arkann, de son coté, tentait
de laguicher, soufflant flammes et fumée sur elle, utilisant
le doux duvet de son museau pour lui caresser la face. Elle allait risquer
sa vie. Ne méritait-elle pas un gage dappréciation?
« À genoux, Arkann. Fais moi sentir ta langue
»
Il égratigna la peau de son
cou avec ses canines acérées en une menace à peine
voilée, mais elle navait aucune crainte. Elle avait un levier
incomparable, et elle sen servit sans vergogne. Lentement, brûlant
sans contrôle, Arkann mit un genou à terre. Il devait baisser
la tête pour
atteindre les seins de Milène, ses mains allant se poser sur les
fesses de celle-ci. De gros doigts puissants qui pétrissaient sa
chair alors quune langue brûlante commençait à
explorer délicatement sa peau, traçant une
spirale centrée sur son mamelon droit, sapprochant de lui
paresseusement, comme si Arkann avait toute la patience du monde. Elle
sentait les canines qui égratignaient délibérément
sa peau, pour verser sa salive venimeuse en
surface. Un venin aphrodisiaque, qui servait à maintenir une proie
dans un état de distraction avancé pendant que le prédateur
buvait goulûment le sang nourricier.
Sa bouche atteignit le mamelon, puis
les lèvres se serrèrent autour, la langue titillant le téton
de longs moments, appliquant la salive sur toute sa surface. Puis Arkann
ouvrit la bouche, et mordit de ses longues canines
ce sein délicat et sans défense. Il entendit le gémissement
de Milène lorsque le venin entra dans son système, se répandit
en elle, lentement. Elle avait donné une fille à Arkann,
et ceci était comme lorsque celle-ci, encore bébé,
se nourrissait à son sein, plantant de petites dents aigues
pour extraire sang et lait. Une douleur brève, suivie par leffet
aphrodisiaque du venin. Avec Arkann, leffet était multiplié.
Et puis il retira ses canines delle,
lécha le sang perlant des délicates incisions
et passa
à lautre sein. Cette fois, il alla directement au mamelon,
lui donna de longs moments dattention. Il ne la mordit pas, mais
il la poussa, à la renverse sur le lit, ses mains allant sur ses
cuisses et les ouvrant à son regard.
Le cur de Milène battait
rapidement. Elle soupirait, tétons humides et, pensant à
ce qui venait ensuite. Arkann ne la déçut pas. Il se pencha,
glissa son museau entre ses jambes, caressa le sexe dénudé
avec le duvet de
ses naseaux pour de longs moments, avant de la mordre à lintérieur
dune cuisse, profondément, trouvant lartère
fémorale sans difficulté. Il ne cherchait pas à se
nourrir, mais à lenvenimer, à laffaiblir par
la perte de sang. Chaque battement de cur envoyait de plus en plus
de son venin au travers du corps, la plongeant dans un état presque
fiévreux. Elle gémissait, geignait, lappelait à
la prendre, mais Arkann voulait se brûler en elle, lui montrer qui
était le maître à ce petit jeu quelle avait
commencé.
« Arrête. Arrête!
»
Il daigna retirer ses crocs, prenant
soin de la guérir pour éviter la perte de sang, mais tourna
son attention sur le sexe délicat qui lui était offert,
qui se poussait vers lui. Il joua des lèvres, de la langue, et
de ses crocs. Il légratigna en maints endroits, usant de
sa langue pour répandre sa salive, la faire brûler en surface.
Il voulait la faire languir, la travailler,
la tourmenter, mais elle nétait pas sans moyen, et le saisit
par les oreilles, le força à la joindre sur le lit. Une
fois à sa portée, une main se saisit de son membre, et cela
scella
la reddition mutuelle. Il manoeuvra, la tira complètement sur le
lit. Ce lit, léger et démontable, qui nallait peut-être
pas survivre lépreuve.
Il attrapa les poignets de Milène,
les immobilisa au-dessus de sa tête dune seule main, puis
il roula sur elle, et de sa main libre guida son érection jusquà
elle. Malgré la verge de métal quelle avait porté
nuit et jour pendant des semaines, malgré son excitation qui lavait
rendu mouillée, elle était trop étroite, trop serrée
pour laccommoder avec aise.
Ses instincts commandaient une brutale
conquête : avec grand effort, il parvint à se modérer,
à se glisser en elle, centimètre par centimètre,
à donner à son corps le temps de sadapter. Il lui
faisait mal, mais de ce genre de mal qui était nécessaire,
désiré. Les cuisses de Milène lagrippaient
aux hanches, les chevilles croisées derrière lui, Milène
cherchant langle qui permettrait à Arkann de senfoncer
prestement en elle.
Il la pénétra, pressant
doucement, saidant de la gravité, jusquà ce
quil ne puisse entrer plus profond, même sil avait les
dimensions pour continuer. Ses mains étaient maintenant sur les
hanches de la brunette, son poids reposant sur elle, lenfonçant
dans le matelas de paille. Il
lécrasait, et elle devait utiliser ses mains pour se donner
de lespace pour respirer, la poitrine dArkann contre son visage.
Elle lui laissa sentir ses ongles en rappel, même si elle saccommodait
bien de cette situation, et il bougea un bras pour laider un peu,
une réaction plus automatique que réfléchie.
Il était perdu dans les sensations.
Létreinte mouillée du fourreau qui lenrobait
était si serrée que le mouvement était ardu. Et puis
il y avait cette certitude quelle lui donnerait des fils, une chose
qui était si rare
Ils bougèrent, dun commun
accord, partenaires depuis des siècles. La tête, large et
aplatie, agissait comme un piston, et produisait une succion audible,
un son obscène.
Le plaisir dArkann était
multiplié par les sensations offertes par son corps réel,
dont il ne sétait pas servi depuis des siècles. Il
frémissait de puissance et de force à peine contenue. Il
clouait Milène au fond du matelas, le bois du lit craquant à
chaque fois quil senfonçait en elle, ce craquement
accompagné par les petits cris de douleur et de plaisir que Milène
narrivait plus à contenir.
Il simposait au corps de la femme,
et il augmentait graduellement la cadence, dévoré par les
flammes, par son ardent désir. Il sentit lune des mains de
Milène se fermer autour de son pénis, la partie quil
ne pouvait
insérer en elle. Puis lautre main vint aussi, pour ajouter
une certaine longueur, lempêcher de senfoncer trop profondément
en elle. Un soupir lorsquelle serra très fort. Les mains
lui permettaient dêtre plus vigoureux sans risquer de la blesser.
Un coup de rein, qui la fit crier dune
douleur difficile à différencier du plaisir. Un autre, plus
dur. Une cadence plus rapide, plus fougueuse.
Milène
était perdue.
Douleur, plaisir, désir et peur formant un mélange puissant,
irrésistible. Elle était écrasée sous le poids
dArkann, avait peine à respirer. Il y avait le venin, qui
brûlait dans ses veines. Il y avait la perte de sang, qui faisait
battre son cur plus apidement. Il y avait le risque quelle
prenait.
Mais il y avait surtout le plaisir,
rendu plus intense par une chasteté involontaire qui avait duré
des années, laspect physique lui-même, son propre désir
et celui dArkann, qui brûlait à ses sens, lappât
du gain car il saurait la récompenser, et le levier quelle
avait sur lui.
Il brûlait, il avait désespérément
besoin de répandre en elle son essence
mais il ne pouvait
la prendre avec toute la vigueur quil voulait, la fougue requise
et cela plaisait à Milène. Elle lui laissait entendre son
plaisir, elle criait, gémissait, appelait son nom au moment de
lorgasme, savourait sa frustration, son désir de connaître
la même chose
et il savait exactement ce quelle faisait,
combien elle jouait avec lui, à quel point le plaisir de Milène
était amplifié par ce jeu de pouvoir.
Il savait quil y parviendrait
éventuellement. Il sentait son plaisir monter, croître, mais
ce corps était fait pour un usage très vigoureux
« Arrête! Arrête!
» Milène nen pouvait plus, son corps trop sensible.
Elle lui fit des menaces lorsquil ne sarrêta pas, mais
il ne lécoutait plus, perdu dans cette tempête qui
se pointait, qui promettait une intensité rarement atteinte. Cétait
au tour de Milène de goûter à son remède. Milène
avait besoin de repos, de récupérer, mais il ne lui donna
pas un instant. En désespoir de cause, elle caressa son esprit,
lui montra des images delle, lourdement enceinte. Des images des
fils quelle lui donnerait. Des images dautres parmi le harem,
qui suivraient dans ses pas.
Des images irrésistibles. Il
laissa échapper une sorte de hennissement de surprise. Une tempête
passant à ouragan en quelques moments, le plaisir trop intense.
En quelques instants, il atteignit le point de non retour, brûlant
de tous ses feux, sélançant avec toute sa fougue,
sa force, son poids
son pénis tel un bélier aux portes
dune cité assiégée au moment de sa chute, le
tout accompagné des craquements alarmant dun lit de camp
au bord de leffondrement.
Milène criait sous lassaut,
ses mains tentant désespérément de le modérer,
de gagner de lespace, mais elle était trop distraite par
cette douleur qui se déguisait en plaisir, cet orgasme qui ne la
quittait plus, dont elle ne
pouvait redescendre.
Une série de rudes coups de
reins
et elle sentit la bouillante essence dArkann jaillir
en elle, dans ses plus grandes profondeurs, une inondation qui ne tarissait
pas alors quArkann vidait le lourd contenu de ses couilles. Il sacharnait,
lemplissait, lui donnait tout ce quil avait à
donner.
De longs moments, une puissance allant
samenuisant, des halètements épuisés, des mouvements
perdant leur amplitude. Une plénitude, une grande douceur, une
satisfaction sans fin. Arkann roula sur le coté, entraîna
Milène avec lui, toujours profondément en elle, la touchant,
lui murmurant des mots doux, caressant son esprit.
Une lourde odeur de sexe, de sueur,
de fumée, mélangée avec celle du sang dArkann;
Milène lavait mordu profondément. Ni lun ni
lautre navait remarqué cela.
Milène, qui navait plus
de force, endolorie, abusée, exténuée
et totalement
satisfaite après des années de chasteté.
Ils se caressaient, se frottaient sans
force lun contre lautre, exprimant sans mot ce quils
ressentaient
Cétait fait. Les dés
étaient jetés.
Le
Harem 5
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