Histoires Des Invités

 

Le Loup 11

Par Arkann

 

Kazin. Au travers du hublot, je pouvais voir les teintes ocres de ce monde inhospitalier sur lequel les humains nous avaient débarqué, il y avait longtemps. Kazin, siège de l’Empire. Huit milliards de personnes habitaient ce système planétaire.

Trois mois pour se rendre ici. Trois mois… étranges.

J’avais un bras autour des épaules de Vaya. Nous n’avions pas résolu notre contentieux, mais nous avions décidé que… nous nous aimions bien, que nous désirions trouver une solution à long terme. Je n’avais plus de béquilles, ma guérison plus rapide que prévue, et je faisais mes exercices avec détermination. Il ne nous restait plus beaucoup de temps avant que moi et Vaya devions nous battre à nouveau. Les tensions revenaient.

Valérie se tenait à ma droite, un peu en retrait. Après Vaya, de ce voyage, c’est elle dont je me souviendrais le plus. Avant même ces louves, qui avaient été de bonnes compagnes, avec qui j’avais établi des liens qui dureraient peut-être. Toutes, à l’exception de Sélène, qui me détestait profondément. Pendant mon séjour ici, nous allions garder le contact. Après… peut-être que si j’étais de passage sur leur monde respectif…

Ce n’était pas encore un adieu, mais pas très loin non plus. Je n’avais jamais avant été en compagnie d’un même groupe de louve aussi longtemps. Cela faisait mal, de les quitter. Je cachai un sourire, qui était mi-figue, mi-raisin : elles avaient demandé beaucoup de moi, ces derniers jours. J’étais plutôt fatigué.

Que j’avais appris, au cours de ce voyage! Exposé aux coutumes de nombreux mondes, les faiblesses du mien montrées au grand jour. J’avais dû réévaluer beaucoup de ce que je tenais pour acquis. J’étais plus adulte, moins naïf.

Et dans une heure…

**

Ocre. Tout était ocre. La visibilité, réduite à dix mètres. Le vent hurlait. J’avais mes lunettes de protection, mais je n’avais pas mis mon masque filtrant. J’avais voulu goûter à cette atmosphère respirée par mes ancêtres. J’étais servi.

Je toussais, mes poumons se rebellant sous cet assaut. Le goût était âcre. Les fines particules s’infiltraient partout dans mes vêtements. L’air était terriblement sec.

L’Ambassadrice riait de moi, toute amusée, humant cet air comme si elle respirait du parfum, sans même tousser, les bras grand ouvert. Elle était heureuse, de retour après cinq années sur mon monde. Sa djellaba battait au vent. Derrière moi, Valérie portait masque et lunettes. Elle était peut-être masochiste, mais elle était sélective. Je secouai mon masque et le fixai en position, ce qui n’aida pas aussi rapidement que je l’aurais souhaité.

J’étais le seul loup à bord, Vaya et les autres utilisant les navettes normales. L’Ambassadrice avait été très claire qu’elle ne me laisserait pas hors de sa vue.

Elle descendit les marches, comme une gamine, mais s’arrêta net. Il y avait des personnes, en bas de l’escalier, et l’une de ces personnes s’avança vers elle, la prit dans ses bras, et la serra fort contre sa poitrine. Le vent emportait les paroles, mais j’étais amusé; la renarde tentait de se libérer, sans succès.

J’allais descendre, mais mes gardes me firent signe d’attendre. L’un deux parlait dans les oreilles de Valérie, qui hocha de la tête… et le laissa lui prendre son arme. J’étais surpris. C’était la première fois.

En bas, la renarde était maintenant libre, et tirait la manche de cette personne qui l’avait accueilli avec tant d’enthousiasme. Une personne qui ne se laissa pas faire, qui regardait dans la direction de la porte, et nous fit signe de descendre. J’hésitai, mais mes gardes eux me firent comprendre de bouger. Je les sentais tendus. La fennec dirigeant ma garde était juste derrière moi, une main à mon dos. J’allais avec le flot.

L’Ambassadrice était contrariée. Je le voyais bien. Il y avait d’autres gardes en bas de l’escalier, lourdement armés. J’avais un mauvais pressentiment. Celle qui avait accueilli la renarde était une louve, ne portait ni masque, ni lunettes, mais un long foulard enroulé autour de la face qui ne laissait paraître que ses yeux. Svelte, de ce que je pouvais en juger, elle avait un port altier et confiant. Une louve dominante, clairement. Une fourrure grise assez foncée. Elle avait du sang de Kivat, coulant dans ses veines, je jugeais. Elle portait une djellaba similaire à celle de l’Ambassadrice.

Elle me regarda un instant, puis se détourna, et nous mena à un véhicule blindé sur roues. Un VBR-14 d’IMK. J’étais fier de le voir ici, de voir que même Kazin achetait notre équipement. Il avait été modifié, clairement, me paraissait plus lourdement blindé. Son acier était nu. S’il avait jamais eu de peinture, elle avait depuis longtemps été sablée par la fine poussière abrasive emportée par les vents de Kazin. Mes gardes empruntèrent un autre véhicule. Le notre était très luxueux. Deux gardes avec nous, qui nous surveillaient, moi et Valérie.

La porte fermée, le véhicule s’ébranla. J’enlevai mon masque, relevai mes lunettes, alors que la louve libérait sa face de son foulard. L’impression initiale d’une belle louve dominante était confirmée.

« Tu cherchais à me le cacher, Arlenn? » La louve parlait à l’Ambassadrice, mais me regardait avec intérêt.

« Bien sur que non. Mais j’osais espérer que tu aurais plus de sens. »

La louve l’ignora. « Arkel MannJäger. » Elle prononça mon nom parfaitement. Je me raidis inconsciemment.

« Il est préféré de retenir le MannJäger, » je lui dis, poliment. « Le nom de famille est trop chargé. »

La louve paraissait légèrement contrariée. « Sélène MannJäger, votre ancêtre, a rendu plusieurs services importants à l’Empire, certains demeurant secret à ce jour. Je suis au courant de votre tradition de taire ce nom de famille –et d’autres tout aussi valeureux- mais cette tradition ne s’applique par sur Kazin. » Un ton poli, mais ferme et sans appel. Elle me faisait beaucoup penser à Vaya, allant de la forme de son visage, à certaines de ses manières.

« J’apprécierais s’il vous était possible de taire mon nom de famille. Mon ancêtre… a fait de grandes choses, mais elle a aussi été criminelle de guerre. Si l’espèce humaine est éteinte, c’est en partie de par ses actions.  MannJäger est un nom qui veut tout dire. »

Sa contrariété devint visiblement plus intense, mais elle hocha de la tête. « Fort bien. C’est une injustice envers votre ancêtre, mais comme vous avez été blessé au service de l’Empire, je respecterai vos usages en votre présence. »

Je souris. « Je vous remercie, Madame…? »

Valérie laissa passer un bref rire nerveux, alors que la louve semblait incrédule, et la renarde regardait au plafond en soupirant. Qu’est-ce que j’avais dit?

« Ikel. Zéra Ikel. »

Mon sourire se figea. Non. Elle ne ressemblait pas assez à l’Impératrice. Une farce, alors. Était-ce permis, ici? Elle ressemblait un peu à l’Impératrice. Pas assez, mais… et puis, il y avait le blindé, les gardes, Valérie qui avait été désarmée. Non. … … oui…

« Ne vous inquiétez pas, Citoyen, vous avez de la chance. Je suis de bonne humeur, aujourd’hui, et vous pouvez garder votre tête la ou elle est, sur vos épaules. »

L’Ambassadrice émit un reniflement. « Zéra, il est très intelligent, mais un peu innocent. Il va te croire sur parole, et en conclure que tu as un côté un peu sanguinaire. »

L’Impératrice avait l’air légèrement contrariée. « Je _suis_ sanguinaire. Si la constitution me le permettait, j’enverrais tous nos journalistes à la guillotine. »

L’Ambassadrice fit un petit geste. « Ça, c’est différent. » La renarde lui donna un petit sourire maniaque. « Tu pourrais décréter… »

La louve roula les yeux, s’assit plus profondément dans son siège. « Bienvenue sur Kazin, Arkel au nom inavouable. Vous devrez apprendre à connaître notre humour parfois coupant, à savoir distinguer le sérieux du léger. Les gens de votre monde ont parfois de la difficulté à faire la différence, et prennent alors tout littéralement. »

Je hochai de la tête, assit à l’attention au bord de mon siège.

Elle soupira. « J’aurais dû mentir sur mon identité, je vois. » Elle regarda l’Ambassadrice, « les autres que tu m’as trouvé sont comme ça aussi. Je dois avouer que le Colonel est plus flexible, mais il à l’age mon père, alors… »

La renarde grimaça. « Zéra… » Un avertissement dans le ton de voix de la renarde.

« Les choses ont changé, en ton absence. Tu as fait de moi ce que je suis, et ton départ m’a forcée à voler de mes propres ailes. Assume. » Il y avait de l’amusement sur le visage de l’Impératrice. Puis, à moi de nouveau, « je voulais vous voir, Citoyen. Votre rôle de paratonnerre est dangereux, comme vous l’aurez remarqué. Votre passé moins glorieux vous servira bien, car beaucoup comprendront que vous ne ferez absolument pas l’affaire. Il s’en trouvera cependant toujours pour penser que la maskirovka d’Arlenn est trop évidente, et chercheront à vous tuer, juste au cas. Vous diluez le risque des autres, comme ils diluent le votre. Je peux compter sur vous? »

« Oui Madame. »

« Très bien, Citoyen. Et puis, qui sait, peut-être n’êtes-vous pas ce pion que vous pensez être, mais ce roi que je me cherche? »

« Zéra! »

La louve ria, de fort bonne humeur, regardant la renarde du coin de l’œil. « Je suis ton étudiante fidèle, Arlenn. »

« Nous en avons déjà parlé, Zéra. Et puis ce n’est pas le moment. »

La louve considéra la renarde un moment, sa tête inclinée un peu, puis elle me regarda. « Et vous, Citoyen. Pensez-vous que l’Impératrice, louve la plus puissante de l’Empire, doive elle aussi se passer de son loup? »

Je ne voulais rien entendre. « Oui, Madame, » je répondis, sans avoir à penser. Si la louve dominante des louves dominante décidait qu’un mâle lui appartenait, à elle seule, les autres louves dominantes feraient de même.

« Oui, les conséquences seraient fâcheuses, » elle murmura, « mais je garde espoir. Une relation très discrète… »

La renarde laissa passer un vil juron, ce qui fit rire l’Impératrice. « C’est pour mon équilibre mental, » elle dit, à la renarde. « Des fois, je me sens devenir bizarre, l’envie de regarder brûler Rome me prend. C’est une pulsion qui devient plus intense avec le temps. Je suis certaine qu’un petit ami à long terme me garderait… stable. »

La renarde roula les yeux. « Vous les loups êtes trop… pas assez… pour virer fou. »

La louve ria encore. « Ma grand-mère l’a fait, sans se faire prendre. Je me rappelle de grand-papa… »

La renarde grogna, ce qui fit s’esclaffer la louve, qui la prit dans ses bras, « je suis heureuse que tu sois de retour. » Pour le reste du court voyage, elle parla à la renarde, ses seules autres paroles pour moi venant à la fin, des remerciements pour les risques que je prenais, et une poignée de main.

**

Le béton nu était ancien. Un poster aux couleurs délavées par le temps, protégé par une feuille de plastique, montrait une place bordée de jungle. En dessous, « Ipanema – Amérique du Sud – Terre ». Un petit carton sur le plastique avisait discrètement que ce poster avait fait partie des quelques effets qu’un zèbre appelé Alakazoo avait apporté avec lui lorsqu’il avait été exilé sur ce monde par les humains. Le poids de l’histoire suintait de cette pièce dénudée qui allait être mon appartement. Un appartement qui avait appartenu au dernier Ambassadeur humain.

Le poster était la seule décoration. Le reste était… fonctionnel. Une table de métal avec deux chaises en plastique. Au-dessus, un lit que je pouvais accéder par une échelle. Un vieux comptoir à la surface abîmée, un petit réfrigérateur, une cuisinière. La porte pour la salle de bain. Il était facile de distinguer ce qui était contemporain de ce qui était ancien : le neuf était dernier cri, haut de gamme.

L’ordinateur sur la table était tout ce qu’il y avait de plus puissant. Le matelas et les draps étaient neufs. La cuisinière et le réfrigérateur aussi. Pour le reste… ce zèbre appelé Alakazoo aurait été familier avec tout.

Je me tournai vers le bouc qui m’avait mené ici. « C’est un très grand honneur que l’on me fait. »

Il hocha sobrement de la tête. « Ce n’est pas très confortable, ou beau, mais il y a des gens qui tueraient pour pouvoir vivre dans la cité antique. » Il semblait amusé, « soyez heureux que l’on ne vous ait pas fait l’honneur de vous héberger dans ‘Container city’. Nos ancêtres ont habité ce qu’ils pouvaient. » Il y avait un grand respect dans sa voix. « Encore qu’un citoyen de Kivat, je suis certain, endurerait sans broncher. »

« Oui, » je lui répondis. « Je suis très conscient de l’honneur qui m’est fait. Je vais prendre grand soin des lieux. »

Une pointe de tension le quitta. « Ce ne sont pas tous les étrangers qui saisissent complètement, » il m’avoua. Puis, il me montra tout de cet appartement, m’avisa de ses problèmes, s’assura que j’étais conscient que je devais lire le manuel de sécurité. La cité antique était souterraine, creusée dans le roc, par ordre du Général Ikel, qui voulait protéger ce qu’il pouvait, en un temps ou une guerre avec les humains dans les décennies
à venir semblait inévitable. Beaucoup de coins avaient été coupés. En cas d’incendie, il fallait rapidement rejoindre l’une des zones de refuge avant que la fumée ne s’accumule.

Il s’en alla, et j’enlevai mon casque de sécurité. Les éboulements étaient rares, mais les corridors de la cité souterraine laissaient parfois chuter des pierres, rendant le port du casque obligatoire.

J’avais été pris en charge par le bouc, qui m’avait laissé son numéro, ainsi que les documents nous permettant d’habiter cette zone à accès restreint. Il m’avait aussi donné mes assignations pour les prochains jours.

« C’est très… spartiate. » Valérie regardait la pièce avec une expression malheureuse. « Il n’y a pas… beaucoup de rangement. »

« Ça sera suffisant. »

Elle ne répondit pas, ce qui exprimait son désaccord. J’avais besoin de peu. Elle aurait le reste. Je ne tentai pas de la convaincre d’aller ailleurs, à mes frais. Ça aurait été peine perdue.

Quelques minutes pour tout bien ranger. Valérie contemplait le sac de voyage qu’elle avait. Le reste de ses bagages allait lui être livré dans une heure ou deux…

**

La renarde rousse avait un très grand sourire. « Citoyen, nom retenu. Nous sommes heureuses d’avoir un de nos cousins de Kivat parmi nous.  Je présume que vous êtes un descendant de Sélène, nom retenu?»

J’apprenais à endurer le son de mon nom de famille. Ils étaient rares les citoyens de Kazin qui savaient quels noms de famille de Kivat ne devaient pas être prononcés. Dans un Empire aux milles planètes, c’était plus que compréhensible. Que la renarde en soit consciente et ait la délicatesse de ne pas le prononcer était une surprise bienvenue.

Je hochai de la tête. « Oui. » J’étais surpris que tant de gens sur Kazin semblaient connaître les faits d’armes de mon ancêtre. « Hmm. Je… suis nouveau, ici, et… »

Son sourire devint plus grand, si c’était possible. « Bien entendu, et nos pratiques diffèrent substantiellement de celles de Kivat. Vous aurez entendu parler de nos coutumes, mais ne possédez pas les détails. Ne vous inquiétez pas : nous nous spécialisons dans l’accueil des loups étrangers, et nos clientes en sont conscientes : aucune ne prendra offense si vous faites une erreur, et nous vous demandons de faire de même, si l’une d’elle en fait une. Venez avec moi, et nous pourrons discuter. »

La renarde était plus que gracieuse, et me mena à un grand balcon ou il y avait des tables, surplombant une aire ouverte en contrebas. Le centre était situé dans la cité antique, mais l’endroit avait été creusé dans le roc à une époque moderne. Ici, un luxe raffiné régnait, de la végétation partout, de l’éclairage comme celui donné par le soleil terrien. Tout était plaisant à l’œil. Un havre de confort au milieu d’une zone ou le poids opprimant de millions de tonnes de roche pesait au-dessus de moi. J’aimais la cité antique, qui voulait tant dire, mais j’étais loin d’y être confortable.

On nous apporta une théière, et deux tasses, dès qu’on nous vit s’asseoir. C’était la coutume sur Kazin, de servir le thé pour toute raison, l’une des règles de leur hospitalité. Un thé qui avait un arrière-goût un tantinet âcre que je n’aimais pas vraiment. Mais, ici, il ne fallait pas refuser, alors j’apprenais à en boire.

Elle versa le thé, puis, « la chose la plus importante pour vous, je présume, est le fait que notre système ne soit pas égalitaire. Notre aristocratie passe en premier, puis viennent celles qui ont de l’influence, ensuite celles qui ont de l’argent. Et en dernier, celles qui n’ont rien de tout çela. » Elle haussa un sourcil pour confirmer que ce qu’elle disait était correct.

Je hochai de la tête. C’est ce que j’avais entendu.

Elle prit sa tasse, goûta le thé, sourit, puis, « bien. Je comprends très bien l’aversion de vos gens envers notre système. Nos louves l’acceptent volontiers, cependant. Chaque louve noble paie un montant significatif pour ce privilège. Celles d’influence paient, ou s’arrangent pour que d’autres le fassent. Celles qui en ont les moyens paient encore plus. Ces louves se trouvent à financer le système en entier pour la majorité des autres louves, et pas seulement pour le réseau de Centres de Reproduction. Une louve sans le sou et sans patron n’aura aucun frais à payer, et ses enfants bénéficieront du fond d’assistance pour l’éducation dans lequel les excédents de bénéfice –ils sont substantiels- se retrouvent. C’est en partie une redistribution de la richesse. »

« Peut-être, mais l’accès n’est pas égal. »

Elle hocha de la tête. « C’est exact. Chaque louve possède son quota d’accès triennal, et l’utilise comme bon lui semble. Elle peut l’augmenter en finançant le système… ou par ce privilège découlant de la noblesse. Cela va à l’encontre de vos principes socialistes, mais c’est le système que nos louves ont choisies pour elles-mêmes. Vous êtes bien entendu libre de passer vos trois nuits par semaine qui vous appartiennent comme bon vous semble. Je sais que ce n’est pas un problème pour un citoyen de Kivat, mais il est interdit par la loi de monnayer votre disponibilité. Sur Katar et de nombreux autres mondes, les choses sont différentes, et c’est pourquoi il m’est requis d’aviser tout étranger. »

« Je comprends. »

« Très bien. Vous aurez entendu parler du principe d’Anonymat qui a lieu, ici? »

« Oui. Nous comprenons très bien les impératifs du droit à la vie privée, sur mon monde. »

Elle me fit un signe pour me dire que je ne comprenais pas aussi bien que je le pensais. « Je crains que ce principe d’Anonymat soit à sens unique, » elle me dit avec une petite moue de déplaisir. « Seules les louves s’attendent à le voir respecté. L’anonymat des loups est malheureusement violé de manière tout à fait routinière, lorsqu’une louve arrive à l’identifier. Nos… journalistes sont des êtres –restons polis- sans scrupules, et nos louves tendent à vouloir punir ou récompenser leurs partenaires de manière très directe. Ici, il est tout à fait normal pour une louve de parler aux journalistes, souvent de manière très… indiscrète et détaillée. »

« Pardon!? » Encore une chose dont mon gouvernement ne parlait pas! Et cette chose était de taille, terriblement choquante, ce qui était certainement la raison pourquoi nos médias se taisaient sur cette question.

Son sourire était un peu forcé. « C’est la coutume, je crains bien. C’est pourquoi vous devrez prendre soin de ne pas vous révéler. »

« C’est inacceptable. »

Elle secoua la tête. « Aussi désagréable qu’elle soit, c’est la coutume. Et vous ne pouvez pas faire de même. La noblesse a besoin de l’anonymat, afin d’éviter qu’un loup puisse réclamer quelque privilège de ce soit pour avoir été le géniteur de, par exemple, la future Duchesse de Nörbar. »

Ça, je pouvais comprendre, mais le reste…

La renarde était pressée de continuer, ne voulant pas s’attarder à ce qu’elle savait être un problème sérieux pour un Citoyen de Kivat. « Votre cas va être épineux à gérer, » elle m’avoua, « votre dossier est tout ce qu’il y a de plus impeccable. Nos louves savent que votre Croix de Sivant n’est accordée que très rarement. Elles voudront deviner, si elles le peuvent. Il y a aussi certaines rumeurs très délicates qui courent à votre sujet. Vous serez la proie des journalistes, je le crains. »

« Que voulez-vous dire, un dossier impeccable? »

« Il n’y a aucune imperfection à votre dossier. Très désirable, en tout points. »

« Ma condamnation pour trahison doit certainement peser, non? »

Elle cligna des yeux, l’air surprise, ouvrit le dossier qui portait mon nom, et regarda rapidement, puis une deuxième fois, plus lentement.

« Il n’y a aucune indication à cet effet. » Elle eut l’air troublée, quelques instants, puis ria d’un rire très amusé. « Vous êtes le premier Citoyen de Kivat que je vois embrasser notre forme d’humeur. Vous m’avez eue. »

Elle pensait que je m’amusais. Je mis un doigt sur la marque noire de mon épinglette. « Malheureusement, je suis sérieux. »

Son expression prit un air neutre. « Je n’ai aucune mention à cet effet dans nos dossiers. Nos dossiers sont toujours très méticuleusement compilés par le personnel le plus hautement qualifié. Êtes vous certain de ce que vous avancez? »

« J’ai passé cinq ans de ma vie dans un pénitencier. Oui. Assez certain. »

Un long moment de silence de sa part. Une nouvelle lecture lente et complète de mon dossier. Elle se leva, « excusez moi, je reviens dans quelques minutes. »

Elle revint après une heure, de nouveau souriante. « Votre Ambassade confirme qu’il y a bien erreur dans nos dossiers. Nous allons amender votre dossier. »

« Je vois. Avez-vous idée de ce qui fait que mon dossier était incomplet? »

Elle était toujours debout. « Nous allons déterminer la cause dès que possible. Pour le moment… pourriez-vous me suivre, s’il vous plaît? La personne à qui vous êtes assigné est arrivée, et elle est d’un rang qui ne supporte pas l’attente. Vous comprendrez que nous n’assignons que les meilleurs mâles à notre noblesse… »

« Très bien. » Je me levai, l’accompagnai. Elle s’excusa pour le manque de temps et la pression indue, mais…

Elle me mena à la porte d’un vestiaire et me donna un petit disque blanc avec « E-15 » imprimé en noir sur les deux faces. « C’est la pièce ou vous devez aller. Changez vous, prenez une robe de chambre, et suivez les indications. » Elle tentait de ne pas le laisser paraître, mais elle était tendue. Ici, la Noblesse avait de nombreux privilège, et faire la vie dure à une personne qui me semblait très compétente était certainement dans le domaine du possible.

Je me pressai. À l’intérieur… l’éclairage était très différent. Tout était en blanc, ou en noir, sans aucune teinte de gris pour gradation... Même ma fourrure me paraissait étrange. Il y avait deux loups mâles en train de se changer, le plus de loups mâles que j’avais vu en un seul lieu depuis des années. On me salua, et je répondis. Quelques instants pour bien évaluer la situation, mais il était évident que j’étais le loup dominant, et les deux autres agirent en conséquence. L’effet de la lumière faisait que tout ce qui n’était pas noir ou d’une teinte foncée paraissait blanc. L’un des loups était noir comme la nuit, et l’autre –un loup gris- était d’un blanc presque scintillant la ou il n’était pas noir comme le charbon. Très bizarre.

J’aurais bien aimé converser avec eux, mais je voulais aller vite pour la renarde. Je plaçai mes choses dans un casier, enfilai une robe de chambre éclatante de blancheur, glissai mes pieds dans des pantoufles, et sortis par l’autre porte. Un long corridor, avec de nombreuses portes. De belles odeurs masquaient les odeurs de loups ou de louves. L’une des choses assurant l’anonymat des louves. Sur les murs, des pièces d’art, faites pour ce genre de lumière. Une musique feutrée et plaisante.

Les indications étaient simples, directes. Je passai une louve. Une louve noire, ou grise foncée, car je ne pouvais pratiquement voir que sa robe de chambre et ses pantoufles, du moins jusqu’à ce que je sois proche d’elle. À courte distance, je pouvais déceler ses formes, mais pas les détails de son visage. Elle m’offrit un sourire d’un blanc éclatant auquel je répondis, et continua son chemin. Puis, la porte « E-15 ». Il fallait insérer le jeton dans une fente, et la porte se débarra avec un click audible. Une lourde porte coupe-son.

J’entrai dans une pièce assez grande. Accrochées aux murs, des peintures exploitant l’effet particulier de la lumière ambiante. Des meubles qui étaient présents plus pour décor que pour toute autre raison, avec l’exception du grand lit. Deux portes : l’une montrant qu’elle menait à la chambre de bains, l’autre à la salle d’armes. Deux loups de rangs à peu près égaux pouvaient avoir besoin de régler les choses selon les règles.

Couchée sur le lit, visible plus par sa noirceur sur le couvre-lit blanc que pour toute autre raison, sa robe de chambre négligemment étendue sur le dos d’une chaise, la louve avec qui je passerais la nuit. J’arrivais à deviner certaines choses, comment elle était étendue sur le côté, sa tête supportée par une main. Elle me regardait, sans dire un mot. Je ne pouvais déceler son odeur.

« Pourrais-tu fermer la porte, s’il te plaît? » Une voix légèrement rauque. Je savais que les louves inspiraient un gaz qui changeait leur voix pour un temps, afin que la voix ne les trahisse pas. Les mâles devaient avoir la même chose, mais… je ne l’avais pas vu. Il me faudrait ne pas parler.

Je fermai la porte doucement. Elle ne semblait pas trop vieille, sa fourrure probablement grise foncée. Élancée, peut être athlétique. Était-ce moi qui la peinturait défavorablement? Elle me semblait snob, hautaine. Certainement, ce que je pouvais déceler de son langage corporel m’avisait que c’était une louve qui se sentait confortablement dominante.

« Nous verserais-tu du champagne? Celui qui est fourni ici est assez bon, et c’est une bonne manière de casser la glace. »

Alors que je versais, elle me dit, « tu me sembles bien silencieux, le loup. Aurais-tu oublié ta pompe? » Elle tenait un objet dans une main, le secouait. « Tiens. Ta voix en sera déguisée.  Encore que… pour quoi faire? Je te sens. »

Je pris cette pompe, tout de même, et inhalai. Je toussai un peu. Je sentais le gaz faire effet. Puis, l’effet irritant se dissipa.

« Ça surprend un peu, la première fois, » elle me dit.

« Comment savez-vous que c’est la première fois? » Ma voix me semblait plus grave encore, plus profonde. Méconnaissable. Pas mal du tout, cet effet.

« Tu es étranger à ce monde. Aucun loup de Kazin n’oublierait de prendre les précautions de base, et ils sont rares les étrangers qui l’oublient… deux fois. » Son sourire était amusé.

Le côté légèrement rauque de sa voix n’était pas du tout déplaisant, même s’il était artificiel. Et je pouvais maintenant la sentir, malgré les odeurs ambiantes, mais même cette odeur était altérée, par un parfum envoûtant.

Je lui tendis son verre, qu’elle prit de manière gracieuse. Elle le leva; « santé et bonheur. » Elle goûta au champagne, ce que je fis moi aussi. De très haute qualité, à ce que j’en savais.

Encore un peu de champagne, prenant le temps de le savourer. La deuxième impression était encore meilleure que la première. Elle ria, tout bas. « Vous n’en avez pas comme celui-ci sur Kivat, je croirais, » elle me dit. Aucune moquerie dans sa voix. « La prochaine fois, Citoyen, nous nous passerons de champagne, car tu sembles plus l’apprécier que celle qu’il est supposé mettre en valeur. »

« Pardon. » J’étais tout penaud. Ce champagne était un charme pour mes papilles. Puis la réalisation me frappa. « Comment savez-vous que je viens de Kivat? »

Elle trempa ses lèvres dans le précieux liquide, prit son temps, puis, « tu as la carrure générale que j’associe à un loup de Kivat. Tu te tiens comme un soldat. Ta voix est déguisée, mais ta diction et ton accent te trahissent. Je suis bonne observatrice. Mais vraiment, c’est que je sais qui tu es, Arkel. »

Je me sentis raidir. « Comment savez-vous cela. Je croyais que l’anonymat était important!? »

Un sourire, un ton amusé. « Il l’est. Ne crains pas. Je puis t’assurer que je vais demeurer parfaitement anonyme. »

Ce monde n’était pas le mien. Il n’était pas facile d’agir en conséquence. « Ce n’est pas très équitable. » Le plus doux que je pouvais faire, dans les circonstances. « Vous avez enfreint la loi, pour obtenir mon nom. »

« Mais pas du tout, Arkel. L’argent fonctionne, l’influence aussi… mais dans mon cas, c’est le rang qui m’a permis de t’avoir. Notre monde, nos lois sont ainsi faites. Beaucoup d’argent ou d’influence, ou encore un bon rang. Si c’est le rang, pour obtenir l’information, il faut au moins être Baronne. Pour s’assurer de ta présence, Comtesse. Tu vois? Je suis au moins un peu équitable. Il n’y a pas plus de trois cent louves qui soient aussi comtesses et duchesses impériales au travers de l’Empire. Tu sais presque qui je suis. »

« Je vous trouve bien arrogante, Madame la Comtesse, » je lui dis, de manière un peu moqueuse. Je n’étais pas du tout heureux. Qu’avait-elle fait pour se mériter un tel droit, à part d’être née dans la bonne famille?

« Tu m’en vois attristée, » elle me répondit, amusée. « Tu peux m’appeler… Aurore. As-tu déjà admiré les couleurs de notre soleil se levant sur notre atmosphère poussiéreuse? Lorsque les vents sont calmes, c’est un spectacle magnifique. »

« Aurore n’est pas votre vrai nom, je présume? »

Elle haussa les épaules. « Tu présumes bien. À Rome, tu fais comme à Rome. Sur Kazin, tu fais comme sur Kazin. Tu es mordant, Arkel. Je comprends. Je ne cherche pas à tirer un avantage inéquitable afin de te dominer. Tu n’as pas idée combien il est risqué pour une louve de la Noblesse de se trouver un partenaire sans risquer que tous les détails juteux soient exposés au grand jour dans les journaux le surlendemain. Mon anonymat, ma réputation, le respect de ma vie privée, tout cela m’est très important. »

Je pouvais comprendre. « Si vous m’assurez de votre discrétion, il me fera plaisir d’être tout aussi discret. »

Elle ria, manqua presque de verser son champagne, incapable de s’arrêter pendant quelques secondes. Puis, « je suis désolée de rire. Ça t’est important. Mais je ne puis te promettre le niveau de discrétion que tu recherches. Je ne parlerai pas aux journalistes, mais je me devrai de laisser mes commentaires et impressions dans la base de données centrale. »

« La base de données centrale? »

Elle sourit. « Elle est consultée par toutes les louves. À toi de t’assurer que mes commentaires soient… flatteurs. »

Je serrai les dents. « Je réponds mal à la menace. »

Elle ferma les yeux un instant. Puis, avec une voix très sincère, « ce n’était pas une menace, mais de l’humour. L’humour de Kazin peut parfois être mal interprété par des visiteurs. Je m’en excuse. »

Il y avait suffisamment de sincérité pour me convaincre. « Cette base de données, ce n’est pas une obligation. »

« Non, » elle confirma. « Mais c’est un plaisir, un désir, une coutume. Me priverais-tu de cette douceur? Il ne m’est arrivé qu’une fois de laisser un commentaire négatif, et ce mâle le méritait amplement. Les autres… n’ont pas eu à se plaindre, et quelques uns en ont tiré une certaine fierté. Ne me demande pas de m’abstenir. »

« C’est ce que j’allais faire, » je lui répondis. « Vous semblez abuser des lois sans grand remord. »

« Faire usage de son privilège n’est pas abuser de la loi, » elle me répondit. « Tu es probablement capable de me maîtriser, mais je te ferai travailler pour le privilège de me prendre sous la queue, et de me forcer à ne pas exercer mon droit. »

Elle me regardait dans les yeux, sans crainte.

Je ne cherchais pas l’affrontement. Je pris une gorgée de champagne, ce qu’elle fit elle aussi. Elle avait fait sa proposition, j’avais décliné l’offre du combat, et le point était maintenant résolu.

« Vous avez été rapide à… me faire assigner à vous. »

« S’il te plaît. Le tutoiement. Avec mon rang, je me fais vouvoyer constamment. Nous allons faire l’amour, souvent je l’espère, et me faire vouvoyer… » Et elle fit une imitation vraiment comique de la jouissance, ou le vouvoiement était de mise… et ridicule.

« Très bien, Aurore. Je te tutoie. »

« Merci, Arkel. Pour ce qui est de ta question, je n’ai pas été aussi vite que tu le crois. Cela fait maintenant deux semaines que tu es dans notre système planétaire. Tu étais en transit, j’en conviens, mais lorsqu’un loup étranger entre dans notre système planétaire, mes assistants examinent son dossier et me font voir ce qui mérite d’être vu. »

Elle me donnait un regard pénétrant, tentant de lire mon expression malgré la lumière qui effaçait les détails. « L’Impératrice bouge enfin. Plusieurs mâles exceptionnels de ton monde sont présents, en même temps. Tu sembles faire partie de ce groupe. »

Je ne laissai rien paraître. « Ce n’est pas la première fois que j’entends cette théorie. »

Elle renifla. « Zéra est tordue. Tu arrives avec sa conseillère favorite. Il n’y a pas de coïncidence. Tu vas être très sollicité, dès que les autres comprendront ton importance. Je leur laisse deux ou trois jours, pas un de plus. Elles voudront se faire une idée de toi. Certaines vont miser sur toi. »

« Et toi? »

« Moi? Je ne sais pas. Je ne suis pas pressée. Si tu me plais bien, je t’accaparerai. J’en ai l’influence, au moins pour un temps. À moins, bien sûr, que l’idée de connaître une vingtaine de comtesses et duchesses qui pourraient être ta mère ou ta grand-mère ne t’excite. »

Pas trop excitant, non. Pas plus que l’idée d’être accaparé. « Je dois quatre nuits par semaine à l’État. J’ai habitude de passer ce temps d’une manière utile à l’espèce. Pas d’être un jouet. »

« Le choix n’est pas tien, » elle me répondit. Puis, « un loup avisé en vaut deux. Aimerais tu en savoir plus sur l’Impératrice? »

Ça… ça avait un certain attrait. « Je suis curieux… »

Elle me donna un sourire en coin. « L’information à un prix… »

Je m’approchai d’elle, la prit dans mes bras, et l’embrassai. Doucement pour commencer. Nous avions le temps. Je savais embrasser, elle aussi. J’avais une main derrière sa tête, alors que l’autre explorait tranquillement, caressait. Alerte pour ses signes me guidant dans ce qu’elle aimait, ce qu’elle aimait moins. Elle semblait aimer une certaine fermeté, ce qui n’était pas rare avec les louves ayant l’habitude du pouvoir. Avoir un partenaire aussi dominant que soi, se laisser aller juste un peu… je devais avouer qu’il en allait parfois de même avec moi aussi.

Je pris charge. Des lèchements à son museau, à sa gorge. Des caresses à ses oreilles. De petits mordillements. Doucement, je la laissai reposer sur le lit, sur son dos, et m’étendit à son côté. Je découvris que ses seins étaient assez sensibles, que je pouvais la faire frissonner en utilisant ma langue et mes lèvres sur les tétons. Elle aimait aussi les très légers mordillements.

Je prenais mon temps… jusqu’à ce qu’elle comprenne qu’il fallait commencer à me payer, si elle voulait plus qu’une très lente ascension…

Je la léchais, la caressais, alors qu’elle me parlait de l’Impératrice. Beaucoup de ce qu’elle me disait était du domaine public, et elle faisait attention de ne pas me livrer des secrets d’importance, mais elle connaissait manifestement celle qui dirigeait l’Empire, et j’arrivais à mieux l’encourager, plus je m’approchais de ce lieu entre ses jambes…

L’humour décapant de l’Impératrice. Sa personnalité. Des anecdotes. Elle me parlait aussi de l’Ambassadrice, comment celle-ci avait décidé de la former lorsque sa mère avait été assassinée, avait transformé une jeune adolescente en une louve redoutable et efficace. Elle me parlait aussi de ses sautes d’humeur, son intolérance de l’incompétence, combien elle détestait faire de mauvaises décisions. À son niveau, les erreurs avaient des conséquences importantes.

Puis vint un temps ou elle ne pouvait plus vraiment parler, ses mains tenant mes oreilles, ma tête entre ses jambes, ma langue frottant un point précis en elle. Elle était sensible, une de ces louves répondant solidement à une langue bien utilisée. Des caresses de mes doigts. Je retirai ma langue, l’utilisant en surface, la pointe cherchant et trouvant aisément son clitoris.

Je jouai avec elle, bâtissant un feu, utilisant toutes mes connaissances. Elle protestait, voulait que je lui donne le coup de grâce, mais je pouvais faire mieux, l’amenai à ce point qu’il me plaisait de lui faire atteindre. Et puis je lui laissai avoir ce qu’elle cherchait, étendit aussi longtemps que possible la durée, et m’assurai d’une longue glissade le long de l’autre versant.

Après, la tenant dans les bras, bien serrée, je lui mordillai les oreilles, lui murmurai des mots doux, lui laissant savourer la langueur de son corps.

Je savais qui elle était. Je l’avais goûtée, après tout. L’autre jour, après la poignée de main avec l’Impératrice, j’avais reniflé ma main. Cette odeur, et ce goût qu’aucun parfum ne pouvait déguiser, provenaient de la même personne. Je n’allais pas laisser mes actions ou mes paroles lui laisser suspecter que je savais. Ici, elle n’était qu’Aurore, une louve faisant partie de la noblesse… mais pas d’un rang qui importait pour un Citoyen de Kivat. Ce qu’elle m’avait dit, plus tôt, me faisait comprendre pourquoi la spontanéité, la candeur, étaient importants pour elle, lors d’une relation intime. Elle ne devait pas l’avoir souvent, pas lorsqu’une personne savait qui elle était.

Je me surprenais. Peut-être était-ce la transition en douceur, ce rôle qu’elle tenait.

Le tout me laissait cependant avec une question cruciale : pourquoi moi?

Une question pour une autre fois, la louve recommençant à bouger, un appétit en elle…


<<Une petite note pour ceux qui sont curieux: ma cadence d’écriture a effectivement diminué ces derniers temps et risque de se maintenir au niveau actuel pour un temps. Ce n’est pas l’inspiration qui manque (je travaille sur une douzaine de séries, à divers degrés d’avancement, quoique la plupart ne seront jamais exposées), mais bien le temps, car j’ai récemment commencé à dessiner, ce qui dévore une grande partie de mon temps libre.

J’ai beaucoup d’images, d’idées, et j’espère un jour atteindre un niveau qui me permettra de les exprimer sous forme de dessin. Lorsque j’aurai atteint un niveau acceptable, je rendrai disponible certains dessins sur ma fiche. J’espère arriver à un niveau de base d’ici le début de l’automne. Lorsque j’aurai du nouveau, je vous le laisserai savoir. >>

Le Loup 12

 

ŠLE CERCLE BDSM 2006